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lui permettait de voir dans les différentes époques du monde autre chose qu’une série de partitions bien rangées sans rapport entre elles. Will observa que les études de M. Casaubon avaient toujours été d’une nature trop élevée et trop large pour l’exposer à cette erreur et qu’il n’avait sans doute jamais eu à ressentir un effet aussi soudain ; mais, quant à lui il avouait que Rome lui avait donné un sens tout nouveau de l’histoire. Puis, à l’occasion, mais sans trop le marquer, il en appelait à Dorothée et discutait ce qu’elle disait comme un sentiment dont il fallait tenir compte dans le jugement final qu’il portait sur la Madone de Foligno ou sur le Laocoon.

L’idée que l’on contribue à former l’opinion des autres rend la conversation particulièrement animée et attrayante, et M. Casaubon lui-même ne considérait pas sans un certain orgueil sa jeune épouse qui parlait mieux que la plupart des femmes, comme il l’avait remarqué lorsqu’il l’avait choisie. Les choses allant aussi bien, et M. Casaubon annonçant que son travail à la bibliothèque allait être suspendu pour un ou deux jours et qu’après une courte reprise de ce travail il n’aurait plus de raisons de rester en Italie, Will s’enhardit à demander que madame Casaubon ne quittât pas Rome sans avoir visité un ou deux ateliers. Son mari ne voudrait-il pas l’y mener ? C’était une chose curieuse à voir, tout à fait particulière. Will se ferait un plaisir de les conduire.

M. Casaubon, voyant le regard de Dorothée se fixer sur lui, ne put que lui demander si de telles visites l’intéresseraient ; il était à ses ordres pour toute la journée du lendemain, et il fut convenu que Will viendrait les prendre.

Will ne put se dispenser de les mener chez Thorwaldsen, célébrité vivante dont s’enquit M. Casaubon lui-même, puis de bonne heure encore, il les conduisit à l’atelier de son ami Naumann qu’il leur présenta comme l’un des principaux rénovateurs de l’art chrétien ; l’un de ceux qui avaient non