Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/306

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fixant sur Fred ses yeux gris pleins de miséricorde.

Caleb était trop délicat pour nommer M. Featherstone.

— Oui, j’ai tout essayé, tout, je vous assure. J’aurais eu cent trente livres à vous apporter sans un malheur qui m’est arrivé, avec un cheval que j’allais vendre. Mon oncle m’avait donné quatre-vingts livres ; j’en ai prélevé trente en sus de mon vieux cheval pour en acheter un autre, que j’étais sur le point de revendre quatre-vingts livres ou davantage. Je voulais désormais me passer de cheval, mais maintenant il se trouve qu’il est vicieux et qu’il s’est estropié. Je souhaiterais que le diable nous eût emportés, les chevaux et moi, plutôt que de vous causer cet embarras. Il n’est personne que j’aime autant que vous : vous et mistress Garth avez toujours été si bons pour moi. Mais à quoi bon vous dire cela ? Maintenant, vous me regarderez toujours comme un misérable.

Fred se détourna et se précipita hors de la chambre ; il sentait qu’il allait tomber en défaillance, et il avait la notion confuse que tout son chagrin ne serait pas pour les Garth d’une grande utilité. Ils purent le voir monter à cheval et franchir rapidement la grille.

— Fred Vincy me cause là un gros désappointement, dit mistress Garth. Je n’aurais jamais cru qu’il vous entraînerait dans ses dettes. Je le savais extravagant, mais je ne savais pas qu’il serait assez lâche pour faire partager ses risques à son plus vieil ami, à celui qui, moins que tous, avait les moyens de perdre.

— J’ai fait une folie, Suzanne.

— C’est bien vrai, vous en avez fait une, dit sa femme avec un sourire et un signe d’assentiment. Mais je n’aurais pas été le publier sur la place du Marché. Pourquoi me cachez-vous ces choses-là ? C’est tout juste comme pour vos boutons. Vous les laissez partir sans me le dire, et vous sortez avec le poignet de votre chemise pendant sur votre