Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/425

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avant que vous épousiez Bulstrode, et je dois avouer qu’il ne témoigne pas toujours à votre famille les dispositions amicales auxquelles on pouvait s’attendre.

M. Vincy ressemblait peu à un jésuite. Mais il n’est pas de parfait jésuite qui eût tourné plus habilement la question. Henriette eut à défendre son mari au lieu de blâmer son frère, et la conversation finit tout juste à l’antipode de son point de départ.

Mistress Bulstrode, sans répéter à son mari les plaintes de son frère, lui parla, le soir même, de Lydgate et de Rosemonde ; mais il ne partagea pas le vif intérêt qu’elle prenait à l’affaire, et se contenta d’indiquer avec résignation les risques qui accompagnent toujours les débuts de la pratique médicale et la nécessité d’agir avec prudence.

— Notre devoir est sûrement de prier pour cette jeune fille irréfléchie, élevée comme elle l’a été, dit mistress Bulstrode, désireuse d’éveiller un peu les sentiments de son mari.

— Certainement, ma chère. Ceux qui n’appartiennent pas au monde ne peuvent guère faire autre chose pour arrêter dans leurs erreurs les mondains obstinés. C’est ce qu’il faut nous habituer à reconnaître avec la famille de votre frère. Il m’était permis de souhaiter que M. Lydgate ne s’engageât pas dans une semblable union ; mais mes relations avec lui sont limitées à l’emploi de ses facultés pour le service de Dieu, dans la voie que nous trace le gouvernement divin par chacune de ses grâces.

Mistress Bulstrode ne répondit pas, attribuant le mécontentement qu’elle ressentait à la grâce divine qui lui manquait. Elle était bien convaincue que son mari était un de ces hommes dont, après leur mort, on écrirait les mémoires. Quant à Lydgate, une fois agréé, il était prêt à accepter pour sa part toutes les conséquences qu’il s’imaginait prévoir avec la plus parfaite netteté. Il allait se marier dans