Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/95

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drôle de petite église. Et le village ! il tiendrait tout entier dans une coquille de noix. Soit dit en passant, cela vous plaira, Dorothée, car les chaumières ont l’air d’une rangée d’hospices avec leurs jardinets fleuris de giroflées et autres choses semblables.

— Oui, si vous le voulez bien, reprit Dorothée s’adressant à M. Casaubon. Tout cela m’intéressera.

Il ne lui avait rien dit des habitations de Lowick sinon qu’elles n’étaient « pas mal ».

Ils furent bientôt dans une allée sablée passant entre des bordures de gazon et des groupes d’arbres ; c’était le chemin le plus direct pour aller à l’église. On s’arrêta un moment à la petite porte qui menait au cimetière, pendant que M. Casaubon allait à la cure chercher la clef. Célia, qui s’était un peu attardée, les rejoignit bien vite dès que M. Casaubon se fût éloigné et dit de son petit ton rythmé et saccadé qui semblait éloigner toute intention malicieuse :

— Sais-tu, Dodo, j’ai vu quelqu’un de jeune qui marchait le long d’une allée ?

— Est-ce donc si étonnant, Célia ?

— C’est peut-être un jeune jardinier, vous savez ; pourquoi pas ? dit M. Brooke. J’ai dit à Casaubon qu’il ferait bien de changer de jardinier.

— Non, ce n’était pas un jardinier, dit Célia, c’était un monsieur avec un album à dessin et avec de longs cheveux châtain clair. Je ne l’ai vu que de dos, mais il était tout jeune.

— Le fils du pasteur peut-être, dit M. Brooke. Ah ! voici Casaubon et Tucker avec lui. Vous ne connaissez pas encore Tucker ?

M. Tucker était un de ces pasteurs entre deux âges appartenant au clergé inférieur et généralement pourvus d’un bon nombre de fils. Mais, la présentation faite, il ne fut pas question de la famille du révérend, et la fugitive