Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/302

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droits à la satisfaction de tes désirs qu’il n’en a, lui ? S’il y a une chance pour qu’il prenne le chemin de l’hôpital, laisse-le ! peut-être ne pourrais-tu en aucune façon l’empêcher et t-tires-en pour toi le bénéfice. »

Il y eut un silence pendant lequel Fred fut saisi d’un frisson des moins confortables. Il craignait d’apprendre que quelque chose eût été dit à Mary. Il lui semblait entendre une menace plutôt qu’un avertissement. Quand le vicaire reprit la parole, il y avait dans sa voix un changement semblable à une transition rassurante dans le ton majeur.

— Mais j’avais été meilleur que cela une première (ois, et je suis revenu à mes vieilles bonnes intentions. J’ai pensé que je ne pouvais guère m’y affermir davantage, Fred, qu’en vous disant exactement ce qui s’était passé en moi. Et maintenant, me comprenez-vous ? Je désire que vous fassiez son bonheur et le vôtre ; et s’il y a quelque chance pour qu’une parole d’avertissement puisse éloigner de vous tout risque du contraire, en bien ! je l’ai prononcée.

Le vicaire laissa tomber la voix en articulant ces derniers mots. Il se tut. Ils étaient sur une place d’herbe ou la route s’en va du côté de Saint-Botolphe, et il tendit la main à Fred comme pour indiquer que l’entretien était fini. Fred se sentait remué d’une façon toute nouvelle. Quelqu’un de profondément sensible à la contemplation d’une belle action, a dit qu’elle produisait dans l’organisme une sorte de frémissement régénérateur et vous donnait le sentiment qu’on était prêt à commencer une nouvelle vie. Fred Vincy ressentait en ce moment quelque chose de semblable.

— J’essayerai d’être digne… dit-il, s’arrêtant avant d’avoir pu ajouter : de vous aussi bien que d’elle.

Et pendant ce temps M. Farebrother avait repris un élan nouveau pour dire encore :

— Ne vous figurez pas que je croie qu’il y ait, quant à présent, aucun changement dans sa préférence pour vous,