Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/349

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une ou deux fois au Dragon Vert eût été une bagatelle de la part d’un autre, mais chez Lydgate c’était un signe entre beaucoup d’autres, qu’il devenait différent de lui-même, du Lydgate que l’on avait connu autrefois. Il en arrivait à faire lui-même des choses qu’il considérait comme souverainement méprisables. Quoi qu’il en fût de ce changement, attribué en partie à certains mécontentements de sa vie conjugale dont le vicaire avait appris quelque chose par de vulgaires bavardages, M. Farebrother ne doutait pas que ses dettes, dont le bruit public s’occupait de plus en plus, ne fussent la cause principale de cette conduite étrange, et il commença à craindre qu’il ne fût illusoire d’espérer pour Lydgate un secours quelconque de ses amis ou d’ailleurs.

Le refus qu’il avait essuyé, lors de sa première tentative pour obtenir la confiance de Lydgate, ne l’encourageait pas à en tenter une seconde. Mais, lorsqu’il apprit qu’on était venu saisir chez lui, le vicaire se décida à surmonter sa répugnance.

Lydgate venait de congédier un pauvre malade auquel il s’intéressait vivement, et il s’avança vers Farebrother pour lui tendre la main avec un air de bonne humeur qui ne laissa pas d’étonner celui-ci. Voulait-il marquer son fier refus de sympathie et de secours ? N’importe, sympathie et secours lui seraient offerts.

— Comment allez-vous, Lydgate ? Je suis venu vous voir, parce que j’ai eu connaissance de certaine chose dont je m’affligeais pour vous, commenta le vicaire du ton d’un bon frère, où ne perçait pas l’ombre d’un blâme.

Ils s’étaient assis tous deux et Lydgate répondit aussitôt :

— Je crois savoir ce que vous voulez dire. Vous aviez appris qu’on faisait une saisie dans la maison ?

— Oui, est-ce vrai ?

— C’était vrai, dit Lydgate d’un air dégagé, comme s’il lui était facile d’en parler maintenant. Mais le danger est