Page:Eliot - Silas Marner.djvu/246

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Silas fut pénétré de la triste vérité de cette dernière remarque ; mais sa force de caractère ¡’abandonna en face des deux seules espèces de punitions qu’on lui proposait. Non seulement il lui était pénible de faire mal à Eppie, mais il tremblait d’être en désaccord avec elle une seule minute, craignant que l’affection qu’elle avait pour lui n’en fût diminuée. Que même un Goliath affectueux se laisse attacher à une petite créature délicate, redoutant de la blesser en tirant le lien, — redoutant encore davantage de rompre ce lien, lequel des deux, dites-moi, je vous prie, sera le maître ? Il était évident qu’Eppie, avec ses petits pas chancelants, devait faire joliment valser son papa Silas, n’importe quel beau jour où les circonstances favoriseraient sa petite malice.

Par exemple : il avait sagement choisi une large bande de toile, afin d’attacher Eppie à son métier, lorsqu’il était occupé. Cette bande formait une large ceinture autour de la taille de l’enfant, et elle était assez longue pour que celle-ci pût arriver jusqu’au petit lit et s’asseoir dessus, mais trop courte pour qu’Eppie essayât de se livrer à quelque ascension dangereuse. Or, un beau matin d’été, Silas s’était trouvé plus occupé que de coutume, pour mettre en train une nouvelle pièce sur son métier, — circonstance où il avait dû recourir à ses ciseaux. Cet instrument, grâce à un avertissement spécial de Dolly, avait été tenu soigneusement hors de la portée d’Eppie. Cependant, son cliquetis avait eu une attraction particulière pour