Page:Elzenberg - Le Sentiment religieux chez Leconte de Lisle, 1909.djvu/134

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effet de la grande lassitude qui tient le poète et qui lui fait chercher la consolation dans le souvenir : c’est ce que disent les trois premières strophes.

Désormais, le sentiment religieux ne déborde plus comme chez le jeune homme enthousiaste d’autrefois, les expressions personnelles s’en font plus rares. Qu’est-il devenu ? Il a passé dans les poèmes historiques impersonnels et, ne se manifestant plus spécialement ici ou là, il est en réalité répandu partout. De temps en temps seulement, comme pour rappeler que sa contemplation du long défilé des cultes n’est pas celle d’un spectateur désintéressé, le poète laisse éclater son regret en appels ardents :


Où sont les Dieux promis, les foraies idéales,
Les grands cultes de pourpre et de gloire vêtus ?

(Dies Iræ)


Pour quel Dieu désormais brûler l’orge et le sel ?
Sur quel autel détruit verser les vins mystiques ?

(L’Anathème.)


Vers qui s’exhaleront le vœux et les cantiques
Dans les temples déserts ou sur l’aile des vents ?

(La Paix des Dieux)


« Il faut oublier les cultes menteurs », a-t-il dit ; menteurs, peut-être, mais non oubliés. La passion des religions sera sa marque, si bien qu’il ne se