Page:Elzenberg - Le Sentiment religieux chez Leconte de Lisle, 1909.djvu/39

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hostilité ne s’exprime plus nulle part ; il se contente de la laisser de côté. Pour la papauté ou le clergé, ni éloge ni blâme. Il est vrai que Roufifet et Houein sont élèves d’un séminaire, et qu’il ne les en aime que mieux ; et quand un de ses amis se fera prêtre, ce n’est certainement pas pour dire du mal des prêtres qu’il lui adressera des vers : mais fallait-il être un fervent catholique pour parler de la prêtrise avec élévation et noblesse ? Ailleurs, au contraire, il prend beaucoup de liberté ; dans Mon premier amour en prose il raconte, sur le ton badin, comment c’est pendant une messe qu’il s’éprit « de la plus délicieuse peau orangée qui fût sous la zone torride », et il n’hésite pas à avouer son peu d’attention à ce que tel de ses collègues de la Variété n’aurait pas manqué d’appeler les mystères sacrés[1].

Sur toutes les croyances particulièrement catholiques c’est, dans sa prose et dans ses vers, un silence

  1. Remarquons que le livre qu’il admire alors avec le plus de passion, c’est Lélia, et qu’il s’y trouve à l’adresse du catholicisme des phrases bien dures, comme celle-ci : « Tant qu’il y aura un catholicisme et une Église catholique, il n’y aura ni foi, ni culte, ni progrès… Il faut que cette ruine s écroule. » Quant à son maître Lamennais, rappelons seulement cette parole [Affaires de Romes, au tome XII, p. 302] : « Mais si les hommes… redeviennent chrétiens, qu’on ne s’imagine pas que le christianisme auquel ils se rattacheront puisse être jamais celui qu’on leur présente sous le nom de catholicisme. »