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dans la sphère privée, le renversement de chaque aspect de la vie quotidienne, l’impossibilité de trouver refuge et protection, de défendre une identité.

« Construire sa propre maison signifie créer un lieu de paix, de calme et de sécurité à l’image du ventre maternel où on peut se retirer du monde et sentir battre son propre cœur ; cela signifie créer un lieu on ne risque pas l’agression, un lieu dont on est l’âme. Passée la porte assure-toi qu’elle soit bien fermée, c’est à l’intérieur de soi que l’on rentre. » écrit Olivier Marc dans l’œuvre précédemment citée. C’est en 2000 qu’Emanuel Licha a réalisé le premier d’une série de voyages en Bosnie-Herzégovine. Dans cette région touchée par l’ethno-nationalisme, le paysage apparaissait et continue à apparaître, plus de dix ans après la guerre, peuplé de fantômes : squelettes abandonnés d’édifices éventrés, aux murs maintes fois traversés par les obus et pulvérisés de pluies de projectiles

Ici en Bosnie-Herzégovine, la guerre n’avait laissé que peu de portes à franchir et fenêtres d’où se pencher. Portes arrachées, fenêtres arrachées, des murs externes des habitations il ne restait souvent que de tragiques fragments. Du dehors, le regard pouvait pénétrer à travers les parois, autrefois internes, désormais non protégées, livrées aux regards et aux éléments extérieurs. Corps dévasté et défait, ici, dans les Balkans, la maison est devenue le théâtre et l’objet des pires violences. Dans les villes on voit encore des appartements réhabilités qui alternent, dans le même édifice, avec d’autres qui restent à refaire, et tous ont en commun des murs extérieurs encore criblés d’impacts : par contre dans de nombreuses zones de campagne ravagées et rasées, aucune maison ne reste sur pied.