Page:Emerson - Société et solitude, trad. Dugard.djvu/36

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la puissance de l’opinion, la puissance d’une activité plus étendue ou mieux dirigée, l’influence affinante des femmes, les opportunités que l’expérience et des causes permanentes offrent à la jeunesse et au travail — quand je vois combien chaque personne vertueuse et bien douée, que tous respectent, vit affectueusement avec nombre d’excellentes gens dont la renommée ne s’étend pas au loin et qu’elle regarde peut-être avec raison comme ses supérieures par la vertu, l’harmonie et la force de leurs qualités, je vois quelles solides valeurs l’Amérique possède, et y trouve un critérium de la civilisation supérieur à celui que fournissent les grandes villes ou les richesses énormes.

À parler strictement, le perfectionnement capital réside dans le progrès moral et intellectuel. L’apparition de l’hébreu Moïse, de l’hindou Bouddha — en Grèce, celle des Sept Sages, du pénétrant et intègre Socrate et du stoïcien Zénon — en Judée, la venue de Jésus — et dans la Chrétienté moderne, de ces hommes vivant leurs idées que furent Huss, Savonarole, et Luther — sont des causes qui entraînent les races à des convictions nouvelles, et élèvent la norme de la vie. En présence de ces forces, il est frivole d’insister sur l’invention de l’imprimerie ou de la poudre à canon, de la vapeur ou de l’éclairage au gaz, des capsules et des souliers de caoutchouc, qui sont des jouets produits aux dépens de cette sécurité, de cette liberté, et de cette joie que crée dans la société une moralité supérieure. Ces inventions ajoutent à la vie privée et publique un certain confort et une certaine facilité ; mais une moralité plus pure qui aiguillonne le génie, civilise la civilisation et rejette en arrière