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Page:Emile Zola, Mes haines - Mon salon - Edouard Manet, Ed. Charpentier, 1893.djvu/103

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que d’eau de pluie : Samson et Dalila, David et Goliath, Judith et Holopherne, les géants bêtes et les femmes cruelles, les terreurs de la trahison et du meurtre. La légende d’Elie est le premier rayon divin et prophétique trouant cette nuit sanglante ; puis viennent les doux contes de Tobie et d’Esther et ce sanglot de douleur, ce sanglot si profondément humain dans sa désespérance, que pousse Job râclant ses plaies sur le fumier de sa misère. Les vengeurs se dressent alors, la bouche pleine de lamentations et de menaces, ces vengeurs de Dieu, Isaïe, Jérémie, Ezéchiel, Baruch, Daniel, Amos, sombres figures qui dominent Israël, maudissant l’humanité féroce, annonçant la rédemption.

La rédemption est cette idylle austère et attendrie qui va, des rayonnements de l’Annonciation, aux larmes du Calvaire. Voici la Crèche et la Fuite en Égypte, Jésus dans le Temple, disant ses premières vérités, et Jésus aux noces de Cana, faisant son premier miracle. J’aime moins cette seconde partie de l’œuvre ; l’artiste avait à lutter contre la banalité de sujets traités par plus de dix générations de peintres et de dessinateurs, et il paraît s’être plu, par je ne sais quel sentiment, à atténuer son originalité, à nous donner le Jésus, la Sainte-Vierge, les apôtres de tout le monde. Sa femme adultère, son Hérodiade, sa Transfiguration, toutes ces scènes et tous ces types connus se présentent à nous comme de vieilles gravures aimées de notre enfance, que nous reconnaissons et que nous accueillons volontiers. Il ne s’est pas