Page:Emile Zola, Mes haines - Mon salon - Edouard Manet, Ed. Charpentier, 1893.djvu/146

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Gascogne, les landes et les dunes, les sables et les récifs. Ici, le sol a encore fait l’histoire : les Pyrénées, les Alpes et le Jura ont vu grandir notre puissance à leur ombre ; la plaie béante que la France a au nord l’a maintes fois conduite à l’agonie ; nos côtes nous ont donné une des premières marines du monde, sans nous accorder cependant les ports magnifiques de notre voisine l’Angleterre. Un Français sent une véritable joie à suivre sur la carte les frontières de son pays, et le seul regret qu’il éprouve est de voir au nord la plaie béante. Les peuples nous doivent la ligne du Rhin, que la nature a certainement créée pour nous.

Le dernier chapitre du livre est le plus délicat et le plus discutable. M. Victor Duruy y étudie les régions naturelles et historiques, et y fait ce qu’il nomme la géographie morale de la France. Ici, nous sommes en pleine physiologie. L’auteur obéit à la direction générale des esprits de notre temps, qui cherchent dans le monde physique et matériel l’explication des faits moraux ; il renouvelle les tentatives de M. Taine et de M. Deschanel. On ne saurait, d’ailleurs, avancer avec plus de prudence et de discrétion sur ce terrain glissant. Il explique d’abord la prépondérance de Paris par sa position géographique ; il établit ensuite, à l’aide du même procédé, ce qu’il nomme les points obscurs et les points lumineux de la France. Personne, jusque-là, n’oserait l’accuser de système ; par exemple, son explication de la prospérité commerciale de la Flandre est excellente : « Un