Page:Emile Zola - L’Œuvre.djvu/227

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
227
L’ŒUVRE.

mauve, prenant chacun son morceau, l’un après l’autre. Et, bien qu’averti, il fut de nouveau stupéfié, lorsqu’il vit Mahoudeau saisir le fusain et écrire sur le mur : « Donne moi le tabac que tu as fourré dans ta poche. »

Sans une parole, Chaîne tira le cornet, le tendit au sculpteur, qui bourra sa pipe.

— Alors, à bientôt ?

— Oui, à bientôt… En tout cas, à jeudi prochain, chez Sandoz.

Dehors, Claude eut une exclamation, en se heurtant contre un monsieur, planté devant l’herboristerie, très occupé à fouiller du regard l’intérieur de la boutique, entre les bandages maculés et poussiéreux de la vitrine.

— Tiens, Jory ! qu’est-ce que tu fais là ?

Le grand nez rose de Jory remua, effaré.

— Moi, rien… Je passais, je regardais…

Il se décida à rire, il baissa la voix pour demander, comme si l’on avait pu l’entendre :

— Elle est chez les camarades, à côté, n’est-ce pas ?… Bon ! filons vite. Ce sera pour un autre jour.

Et il emmena le peintre, il lui apprit des abominations. Maintenant, toute la bande venait chez Mathilde ; ça s’était dit de l’un à l’autre, on y défilait chacun à son tour, plusieurs même à la fois, si l’on trouvait ça plus drôle ; et il se passait de vraies horreurs, des choses épatantes, qu’il lui conta dans l’oreille, en l’arrêtant sur le trottoir, au milieu des bousculades de la foule. Hein ? c’était renouvelé des Romains ! voyait-il le tableau, derrière le rempart des bandages et des clysopompes, sous les fleurs à tisane qui pleuvaient du plafond ! Une boutique très chic, une débauche à curés, avec son empoisonne-