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L’ŒUVRE.

premier godelureau sachant camper un bonhomme, fait retentir toutes les trompettes de la publicité. Et quelle publicité ! un charivari d’un bout de la France à l’autre, de soudaines renommées qui poussent du soir au matin, et qui éclatent en coups de foudre, au milieu des populations béantes. Sans parler des œuvres, ces pauvres œuvres annoncées par des salves d’artillerie, attendues dans un délire d’impatience, enrageant Paris pendant huit jours, puis tombant à l’éternel oubli !

— C’est le procès à la presse d’informations que vous faites là, déclara Jory, qui était allé s’allonger sur le divan, en allumant un nouveau cigare. Il y a du bien et du mal à en dire, mais il faut être de son temps, que diable !

Bongrand secouait la tête ; et il repartit, dans une hilarité énorme :

— Non ! non ! on ne peut plus lâcher la moindre croûte, sans devenir un jeune maître… Moi, voyez-vous, ce qu’ils m’amusent, vos jeunes maîtres !

Mais, comme si une association d’idées s’était produite en lui, il s’apaisa, il se tourna vers Claude, pour poser cette question :

— À propos, et Fagerolles, avez-vous vu son tableau ?

— Oui, répondit simplement le jeune homme.

Tous deux continuaient de se regarder, un sourire invincible était monté à leurs lèvres, et Bongrand ajouta enfin :

— En voilà un qui vous pille !

Jory, pris d’un embarras, avait baissé les yeux, se demandant s’il défendrait Fagerolles. Sans doute, il lui sembla profitable de le faire, car il loua le ta-