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L’ŒUVRE.

Élysées, en se donnant le prétexte d’une longue promenade. Autant là qu’ailleurs ; car il avait cessé tout travail, dans l’attente inavouée du Salon, et il recommençait ses interminables courses à travers Paris. Lui, ne pouvait voter, puisqu’il fallait avoir été reçu au moins une fois. Mais, à plusieurs reprises, il passa devant le Palais-de-l’Industrie, dont le trottoir l’intéressait, avec sa turbulence, son défilé d’artistes électeurs, que s’arrachaient des hommes en bourgerons sales, criant les listes, une trentaine de listes, de toutes les coteries, de toutes les opinions, la liste des ateliers de l’École, la liste libérale, intransigeante, de conciliation, des jeunes, des dames. On eût dit, au lendemain d’une émeute, la folie du scrutin, à la porte d’une section.

Le soir, dès quatre heures, lorsque le vote fut terminé, Claude ne résista pas à la curiosité de monter voir. Maintenant, l’escalier était libre, entrait qui voulait. En haut, il tomba dans l’immense salle du jury, dont les fenêtres donnent sur les Champs-Élysées. Une table de douze mètres en occupait le centre ; tandis que, dans la cheminée monumentale, à l’un des bouts, brûlaient des arbres entiers. Et il y avait là quatre ou cinq cents électeurs, restés pour le dépouillement, mêlés à des amis, à de simples curieux, parlant fort, riant, déchaînant sous le haut plafond un grondement d’orage. Déjà, autour de la table, des bureaux s’installaient, fonctionnaient, une quinzaine en tout, composés chacun d’un président et de deux scrutateurs. Mais il restait à en organiser trois ou quatre, et personne ne se présentait plus, tous fuyaient, par crainte de l’écrasante besogne qui clouait les gens de zèle une partie de la nuit.

Justement, Fagerolles, sur la brèche depuis le