Page:Emile Zola - La Bête humaine.djvu/345

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folle, pour échapper à la responsabilité terrible qui pesait sur elle.

Dès minuit, le cadavre de Flore, dans la petite maison basse, reposa à côté du cadavre de sa mère. On avait mis par terre un matelas, et rallumé une chandelle, entre elles deux. Phasie, la tête penchée toujours, avec le rire affreux de sa bouche tordue, semblait maintenant regarder sa fille, de ses grands yeux fixes ; tandis que, dans la solitude, au milieu du profond silence, on entendait de tous côtés la sourde besogne, l’effort haletant de Misard, qui s’était remis à ses fouilles. Et, aux intervalles réglementaires, les trains passaient, se croisaient sur les deux voies, la circulation venant d’être complètement rétablie. Ils passaient, inexorables, avec leur toute-puissance mécanique, indifférents, ignorants de ces drames et de ces crimes. Qu’importaient les inconnus de la foule tombés en route, écrasés sous les roues ! On avait emporté les morts, lavé le sang, et l’on repartait pour là-bas, à l’avenir.