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Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/238

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LES ROUGON-MACQUART.

— Ah bien ! disait-elle souvent en apportant les plats, il ne faut pas faire tant de bruit… De ce train-là, il n’y a pas de danger que vous vous écorchiez la langue… Soyez donc plus gai, monsieur ; vous avez l’air de suivre un mort. Vous finirez par mettre madame au lit. Ce n’est pas bon pour la santé, de manger sans parler.

Quand vinrent les premiers froids, Rose, qui cherchait à obliger madame Faujas, lui offrit son fourneau pour faire la cuisine. Cela commença par des bouillottes d’eau que la vieille dame descendit faire chauffer ; elle n’avait pas de feu, et l’abbé était pressé de se raser. Elle emprunta ensuite des fers à repasser, se servit de quelques casseroles, demanda la rôtissoire pour mettre un gigot à la broche ; puis, comme elle n’avait pas, en haut, une cheminée disposée d’une façon convenable, elle finit par accepter les offres de Rose, qui alluma un feu de sarments, à rôtir un mouton tout entier.

— Ne vous gênez donc pas, répétait-elle en tournant elle-même le gigot. La cuisine est grande, n’est-ce pas ? Il y a bien de la place pour deux… Je ne sais pas comment vous avez pu tenir jusqu’à présent à faire votre cuisine par terre, devant la cheminée de votre chambre, sur un méchant fourneau de tôle. Moi, j’aurais eu peur des coups de sang… Aussi monsieur Mouret est ridicule ; on ne loue pas un appartement sans cuisine. Il faut que vous soyez de braves gens, pas fiers, commodes à vivre.

Peu à peu, madame Faujas fit son déjeuner et son dîner dans la cuisine des Mouret. Les premiers temps, elle fournit son charbon, son huile, ses épices. Dans la suite, lorsqu’elle oublia quelque provision, la cuisinière ne voulut pas qu’elle remontât chez elle ; elle la forçait à prendre dans l’armoire ce qui lui manquait.

— Tenez, le beurre est là. Ce n’est pas ce que vous allez prendre sur le bout de votre couteau qui nous ruinera. Vous