rat. Quand tu voudras ta part, ils auront tout rongé… Il n’y a que toi qui puisses les faire tenir tranquilles.
Il regarda sa mère avec son sourire mince.
— Mère, vous m’aimez bien, murmura-t-il ; je vous pardonne… Rassurez-vous, je veux autre chose que la maison ; elle n’est pas à moi, et je ne garde que ce que je gagne. Vous serez glorieuse, lorsque vous verrez ma part… Trouche m’a été utile. Il faut bien fermer un peu les yeux.
Madame Faujas dut alors battre en retraite. Elle le fit de très mauvaise grâce, en grondant sous les rires de triomphe dont Olympe la poursuivait. Le désintéressement absolu de son fils la désespérait dans ses rudes appétits, dans ses économies prudentes de paysanne. Elle aurait voulu mettre la maison en sûreté, vide et propre, pour qu’Ovide la trouvât, le jour où il en aurait besoin. Aussi les Trouche, avec leurs dents longues, lui causaient-ils un désespoir d’avare dépouillé par des étrangers ; il lui semblait qu’ils dévoraient son bien, qu’ils lui mangeaient la chair, qu’ils les mettaient sur la paille, elle et son enfant préféré. Quand l’abbé lui eut défendu de s’opposer au lent envahissement des Trouche, elle résolut tout au moins de sauver du pillage ce qu’elle pourrait. Alors, elle se prit à voler dans les armoires, comme Olympe ; elle s’attacha aussi de grandes poches sous les jupes ; elle eut un coffre qu’elle emplit de tout ce qu’elle ramassa, provisions, linge, petits objets.
— Que cachez-vous donc là, mère ? lui demanda un soir l’abbé en entrant dans sa chambre, attiré par le bruit qu’elle faisait en remuant le coffre.
Elle balbutia. Mais lui, comprenant, s’abandonna à une colère épouvantable.
— Quelle honte ! cria-t-il. Vous voilà voleuse, maintenant ! Et qu’arriverait-il, si l’on vous surprenait ? Je serais la fable de la ville.
— C’est pour toi, Ovide, murmurait-elle.