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Page:Emile Zola - La Curée.djvu/369

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LA CURÉE


Ils arrivèrent enfin au terme de leur course. Les anciens terrains de Mme Aubertot étaient très vastes ; le café-concert et le jardin n’en occupaient guère que la moitié, le reste se trouvait semé de quelques maisons sans importance. Le nouveau boulevard prenait ce grand parallélogramme en écharpe, ce qui avait calmé une des craintes de Saccard ; il s’était imaginé pendant longtemps que le café-concert seul serait écorné. Aussi Larsonneau avait-il reçu l’ordre de parler très haut, les bordures de plus-value devant au moins quintupler de valeur. Il menaçait déjà la Ville de se servir d’un récent décret autorisant les propriétaires à ne livrer que le sol nécessaire aux travaux d’utilité publique.

Ce fut l’agent d’expropriation qui reçut ces messieurs. Il les promena dans le jardin, leur fit visiter le café-concert, leur montra un dossier énorme. Mais les deux industriels étaient redescendus, accompagnés du médecin, le questionnant encore sur cette petite maison du comte de Savigny, dont ils avaient plein l’imagination. Ils l’écoutaient, la bouche ouverte, plantés tous les trois à côté d’un jeu de tonneau. Et il leur parlait de la Pompadour, leur racontait les amours de Louis XV, pendant que M. de Mareuil et Saccard continuaient seuls l’enquête.

— Voilà qui est fait, dit ce dernier en revenant dans le jardin. Si vous le permettez, messieurs, je me chargerai de rédiger le rapport.

Le fabricant d’instruments de chirurgie n’entendit même pas. Il était en pleine régence.

— Quels drôles de temps, tout de même ! murmura-t-il.

Puis ils trouvèrent un fiacre, rue de Charonne, et ils