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LES ROUGON-MACQUART.

blême, causait avec ses deux collègues du Jura et du Cher. Et comme il faisait le mouvement de se lever, croyant sans doute qu’il allait enfin être admis, Rougon reprit, en s’adressant à Merle :

— Dans dix minutes, entendez-vous… Je ne puis absolument recevoir personne en ce moment.

Mais il parlait encore qu’il vit M. Beulin-d’Orchère traverser l’antichambre. Il alla vivement à sa rencontre, l’attira d’une poignée de main dans son cabinet, en criant :

— Eh ! entrez donc, cher ami ! Vous arrivez, n’est-ce pas ? Vous n’avez pas attendu ?… Quoi de nouveau ?

La porte fut refermée sur le silence consterné de l’antichambre. Rougon et M. Beulin-d’Orchère eurent un entretien à voix basse, devant une des fenêtres ; le magistrat, nommé récemment premier président de la cour de Paris, ambitionnait les sceaux ; mais l’empereur, tâté à son égard, était resté impénétrable.

— Bien, bien, dit le ministre en haussant la voix. Le renseignement est excellent. J’agirai, je vous le promets.

Il venait de le faire sortir par ses appartements, lorsque Merle parut, en annonçant :

— Monsieur La Rouquette.

— Non, non, je suis occupé, il m’embête ! dit Rougon, en faisant un geste énergique pour que l’huissier refermât la porte.

M. La Rouquette entendit parfaitement. Il n’en pénétra pas moins dans le cabinet, souriant, la main tendue :

— Comment va Votre Excellence ? C’est ma sœur qui m’envoie. Hier vous aviez l’air un peu fatigué, aux Tuileries… Vous savez qu’on doit jouer un proverbe dans les appartements de l’impératrice, lundi prochain. Ma sœur a un rôle. Combelot a dessiné les costumes. Vous viendrez, n’est-ce pas ?