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LES ROUGON-MACQUART.

de sommeil, en cherchant à se mettre sur son séant.

— Cachez-vous, je vous en supplie, cachez-vous, répétait Hélène avec angoisse. Vous la tuez, si vous restez là.

Henri disparut vivement dans l’embrasure de la fenêtre, derrière un des rideaux de velours bleu. Mais l’enfant continuait à se plaindre.

— Maman, maman, oh ! que je souffre !

— Je suis là, près de toi, ma chérie… Où souffres-tu ?

— Je ne sais pas… C’est par là, vois-tu. Ça me brûle.

Elle avait ouvert les yeux, la face contractée, et elle appuyait ses deux petites mains sur sa poitrine.

— Ça m’a pris tout d’un coup… Je dormais, n’est-ce pas ? J’ai senti comme un grand feu.

— Mais c’est passé, tu ne sens plus rien ?

— Si, si, toujours.

Et, d’un regard inquiet, elle faisait le tour de la chambre. Maintenant, elle était complètement réveillée, l’ombre farouche descendait et blémissait ses joues.

— Tu es seule, maman ? demanda-t-elle.

— Mais oui, ma chérie !

Elle secoua la tête, regardant, flairant l’air, avec une agitation qui grandissait.

— Non, non, je le sais bien… Il y a quelqu’un… J’ai peur, maman, j’ai peur ! Oh ! tu me trompes, tu n’es pas seule…

Une crise nerveuse se déclarait, elle se renversa dans le lit en sanglotant, en se cachant sous la couverture, comme pour échapper à quelque danger. Hélène, affolée, fit immédiatement sortir Henri. Il voulait rester pour soigner l’enfant. Mais elle le poussa dehors. Elle revint, elle reprit Jeanne entre ses bras,