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exercent, occupoient avec délices ses momens & charmoient ses maux. Jeunes Artistes, qui venez de perdre un si beau modèle, gardez-en bien le souvenir. Que votre Art soit pour vous, comme il l’étoit pour lui, l’objet constant de vos affections. L’indifférence seroit une ingratitude si vous avez des succès ; & l’inconstance, sur-tout tardive, une source de peines & souvent de ridicules comme les nouvelles passions des amoureux surannés.

A T

ATTACHES, (subst. fém. plur.) On appelle attaches, en terme de Peinture, les muscles & les charnières qui unissent ensemble les os, & qui établissent les mouvemens dont ils sont susceptibles. Ces attaches ont presque toutes des configurations différentes. Les os & les muscles qui les composent, font voir extérieurement leurs apparences & leurs formes au travers de la peau dont ils sont plus immédiatement recouverts que toutes les autres parties du corps. Il est donc trèsimportant que l’Artiste en connoisse parfaitement la structure, le méchanisme, le jeu, & qu’il ait soin, en dessinant ou en peignant, de les faire appercevoir tels qu’ils sont, mais ni trop ni trop peu sensiblement. Le Peintre n’est pas l’Anatomiste ; mais si le Peintre ignore les parties anatomiques qu’il doit représenter, il n’est pas Peintre.

ATTELIER, (subst. masc.) On trouvera au nombre des Planches, qui dans cet ouvrage ont rapport à la Peinture, une vignette gravée d’après M. Cochin, dont l’objet est de donner une idée des occupations habituelles, qui ont lieu dans les atteliers de nos Artistes.

L’attelier du Peintre est le lieu destiné aux travaux de son Art, & cette destination suffit pour que le lieu, quel qu’il soit, où travaillent ses Elèves, & où lui-même dessine & peint, s’appelle attelier ; mais l’Artiste, lorsqu’il le peut, lui donne les dimensions & tous les avantages qui conviennent en général à son Art, & en particulier au genre qu’il traite, au nombre de disciples qu’il admet à son instruction, & à la grandeur des ouvrages qu’il entreprend.

L’attelier d’un Peintre d’Histoire doit être vaste, parce qu’il peut être chargé d’exécuter de très-grands tableaux pour les églises, pour des palais ou pour des galeries. Il est avantageux que l’attelier puisse être éclairé au nord & au midi, quoique l’Artiste n’admette jamais deux jours à la fois ; les jours opposés doivent être placés au milleu des deux faces de l’attelier, que je suppose tourné aux deux expositions dont j’ai parlé. Le nord donne une lumière plus constamment égale que toute autre exposition, parce que le soleil, dont la lumière varie sans cesse, ne s’y présente jamais. Le midi peut, à l’aide des chassis ou des stores de papier & de gaze, procurer au besoin


une lumière plus animée & des tons moins froids que le jour du nord.

Ces observations ne sont pas indifférentes pour le Peintre qui sait en faire un usage intelligent. Les deux fenétres doivent être grandes & élevees, parce qu’alors l’Artiste peut diminuer ou modifier à son gré l’introduction de la lumière, par différens moyens que lui inspirera son industrie. Il proportionne le foyer de sa lumière, à la grandeur du tableau qu’il exécute, & sur-tout à l’effet qu’il aura intention de répandre sur les modèles d’après lesquels il dessine ou il peint ; mais dans ces dispositions dont il est le maître, qu’il se défie des jours qu’il feroit tomber de trop haut ; qu’il se défie encore d’un jour trop peu étendu, dont la lumière vive & trompeuse, éclairant trop ses ombres, pourrait l’induire à les rendre trop fortes, tandis que, d’une autre part, il rendroit ses lumières trop éclatantes ; qu’il craigne que le tableau, exécuté à l’aide de ce jour factice, en sortant de l’attelier, ne perde une partie des avantages qu’il y reçoit. L’Artiste doit penser que, si son sujet n’est pas supposé éclairé d’une lumière de même nature à-peu-près que celle dont il s’est servi, la lumière de son tableau paroîtra peu naturelle, que si la scène de l’action qu’il peint est un lieu découvert, ses modèles & son ouvrage même demandent une grande expansion de lumière.

En général, les tableaux exigeraient, relativement à la place, à la hauteur, au jour que leur assignent leurs possesseurs, des soins plus intelligens que ceux qu’ils prennent ordinairement ; mais on a plus de droit encore d’attendre des Artistes qui les composent des attentions qui peut-être sont habituellement trop négligées, par rapport aux jours qu’ils emploient en les camposant. La Peinture est un Art d’illusion. Il faut que l’illusion ne cesse point de veiller à ses intérêts : elle doit donc, premièrement, présider aux opérations de l’Artiste ; elle doit encore être consultée pour l’emploi qui on fait de ses ouvrages, & l’on peut avancer que s’il y a un Art de peindre, il y a aussi un Art de jouir de la Peinture, qui n’est parmi nous ni assez connu, ni assez pratiqué. Ces Art exige presqu’autant qu’un ouvrage peint soit à sa juste place, éclairé du jour qui lui est propre, qu’il exige que l’ouvrage soit bien exécute. Rien de si ordinaire cependant que de voir des tableaux exposés à de faux jours, & pour la disposition desquels on n’a consulte ni la manière dont le tableau est peint, ni la grandeur des figures, ni l’assortiment réfléchi des décorations dont ils sont partie, ni la convenance des ornemens dont trop souvent on les accable. On feroit aisément sur cet objet un petit traité, utile à l’Art, aux Artistes, & à ceux qui sans connoissances ont au moins la volonté de jouir des ouvrages de Peinture.

Pour revenir à l’attelier, il doit être meublé