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ractères particuliers sont au contraire , comme particuliers sont au contraire, comme nous venons de le faire entrevoir, en aussi grand nombre que les individus, & ce nombre est encore augmenté, relativement au Peintre, par différentes causes attachées à la réunion des hommes & à leur état de civilisation, comme je le ferai remarquer.

D’après ces premières observations, essayons de tracer une espèce de dénombrement des différentes sortes de caractères particuliers.

Caractère des sexes & des âges.

Caractère des conformations principales que nous attribuons au hazard, & auxquelles certaines formes sont attachées.

Caractère national, qui semble dépendre du climat. Ces caractères sont à la fois généraux & particuliers dans les individus qui nous les offrent ; mais chacun d’eux est encore susceptible, sans perdre ces caractères, de particularités que j’appelle individuelles.

Un arbre, un homme, est jeune ou vieux, sain ou débile ; il est sujet aux effets des élémens qui modifient ses formes & leur impriment des caractères sensibles. Toute substance reçoit des marques caractéristiques de ce qui a sur elle quelqu’influence. Les montagnes, les rochers sont sujets à des variétés de formes, & par conséquent de caractère qui désignent jusqu’aux espèces de matières dont ils sont composés, qui annoncent ou qu’ils n’ont pas souffert des atteintes du tems, des effets intérieurs, des accidens dont ils sont susceptibles, ou qu’ils ont essuyé des dérangemens dans les couches intérieures qui les forment, des destructions par les effets de l’air ou des eaux, de la chaleur ou du froid. Il en est de même de toutes les substances de quelques classes qu’elles soient. Les végétaux reçoivent des caractères qu’on peut appeller annuels, de l’effet des différentes saisons. Les animaux en reçoivent qu’on peut souvent appeller momentanés, des circonstances dans lesquels ils se trouvent. Les caractères particuliers des animaux libres ou asservis, domestiques ou sauvages, sont différens les uns des autres, & deviennent sensibles pour tout homme qui les observe ; leurs caractères particuliers sont modifiés par leurs passions, par leurs habitudes ; ils ont même, si l’on peut s’exprimer ainsi, leurs caractères de phisionomie, & le Berger, que la solitude & l’oisiveté conduisent à examiner avec attention chaque individu de son troupeau, démêle dans un mouton une phisionomie qui le lui fait caractériser de malin ou de débonnaire. Je laisse au lecteur à suppléer les détails infinis que comprennent déjà ces divisions indiquées aux Artistes, pour qui elles sont d’autant plus intéressantes, qu’ils aspirent davantage à la perfection de l’Art d’imiter ; & je me contenterai d’indiquer encore quelques-unes de celles que produit l’état de so-


ciété & de civilisation. C’est de cet état, auquel les hommes sont destinés, que s’établissent, par rapport aux Artistes, les caractères que j’appellerai historiques, fabuleux, religieux mythologiques ; &, enfin, tout caractère idéal qui, bien souvent né de l’imagination des hommes, parvient à être reçu comme convention par un grand nombre.

Le caractère particulier historique consiste dans certaines dimensions, proportions, formes & traits que l’histoire nous a transmis, en nous transmettant l’existence & les actions d’un grand nombre d’êtres qui ont existé. Ces caractères regardent particuliérement les hommes qui ont fait une sensation extraordinaire dans le siècle. & dans le pays où ils ont vêcu. Si ce sont (& malheureusement c’est le plus grand nombre) des conquérans, des guerriers, l’Histoire se plaît à entrer dans les détails de leur conformation, & le caractère particulier de cet homme célèbre astreint les Artistes qui les représentent, à les peindre ou sculpter, tels à-peu-près qu’ils sont décrits, & pour l’ordinaire leurs formes, leurs dimensons, leurs traits expriment la force, la vigueur, l’énergie & l’habitude des travaux guerriers. Si ce sont des Législateurs, des Philosophes, des Savans, les formes & les dimensions sont plus vagues, mais les traits du virage tendent à rappeller la gravité, la méditation, toujours d’après un certain caractère particulier de formes & de traits, qui, décrits dans les ouvrages du tems, se trouvent quelquefois attestés par des médailles, des statues, des bustes, des bas-reliefs.

Ces caractères particuliers une fois établis ou convenus, deviennent une loi de costume pour les Artistes, & quand la difformité en seroit la base, comme dans les représentations de Socrate, dans celle qu’on attribue à Esope, il est indispensable à l’Artiste de s’y conformer.

Les caractères particuliers que j’ai nommés fabuleux, astreignent à-peu-près autant que ceux dont je viens de parler ; car les caractères de Jupiter, d’Hercule, de Ganymède, d’Hébé, quoique fabuleux, ont acquis dans les Arts autant de droits que les caractères historiques les plus avérés. Les Poëtes sont les historiens de ce genre de costume : les Artistes anciens, qui se sont conformés aux idées établies par les Poëtes avant eux, ont soumis, sans le savoir, tous ceux qui doivent pratiquer les Arts, à regarder comme véritables les êtres imaginaires qu’ils ont représentés, & le Peintre ou le Sculpteur qui ne se rapprocheroit pas dans la représentation qu’il fait de ces personnages, du caractère particulier, qu’on leur a donnés, ne les désigneroit que d’une manière vague ; ainsi tous les caractères particuliers fabuleux & fantastiques, tels que les furies, certains monstres, les sites infernaux, olympiens, le Tartare, l’Elisée ont un caractère particulier. Il faut que l’Artiste les dessine d’après