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Il a reconnu que les mouvemens du corps & de ses membres sont les causes de la situation actuelle de la draperie & de la formation de ses plis : toute sa pratique n’est qu’un développement & une démonstration de cette théorie, & toute manière de draper contraire à cette observation sera vicieuse. (Article de M. Levesque).

DRAPERIE. Dans l’art de la Peinture, dont le but est d’imiter tons les corps qui tombent sous le sens de la vue, l’objet le plus noble & le plus intéressant est la représentation de l’homme. L’homme, par un sentiment qui naît ou de la nécessité ou de l’amour-propre, a l’usage de couvrir différentes parties de son corps : l’imitation des différentes moyens qu’il employe pour cela, est ce qu’on désigne plus ordinairement par le mot draperie ; mais comme les peintres qui choisissent la figure humaine pour le terme de leurs imitations, sont divisés en plusieurs classes, l’art de draper me paroît susceptible d’une division par laquelle je vais commencer.

Peindre la figure est une façon générale de s’exprimer, qui s’applique à tous ceux qui s’exercent à peindre le corps humain. Les uns entreprennent, d’imiter particulièrement les traits du visage & l’habitude du corps, qui nous font distinguer les uns des autres, & cela s’appelle faire le portrait. Les autres s’attachent à imiter les actions des hommes, plutôt que le détail exact de leurs traits différens ; mais ces actions sont de plusieurs genres : elles sont ou nobles ou communes, ou véritables & historiques, ou fabuleuses & chimériques, ce qui exige des différences dans la manière de draper. Les draperies doivent donc en premier lieu être convenables au genre qu’on traite, & cette loi de convenance qui, en contribuant à la perfection des beaux-arts, est destinée à retenir chaque genre dans des bornes raisonnables, ne peut être trop recommandée aujourd’hui à ceux qui les exercent. Il seroit à souhaiter que, gravée dans l’esprit du peintre de portrait, elle le fût aussi dans l’esprit de ceux qui se sont peindre ; ces derniers choisissant un vêtement convenable à l’état qu’ils exercent, éviteroient des inconséquences & des contrastes bizarres & ridicules, tandis que le peintre assortissant les étoffes, les couleurs & l’habillement à l’âge, au tempérament & à la profession de ceux qu’il représente, ajouteroit une plus grande perfection à ses ouvrages, par un ensemble & une convenance sur lesquels il doit fonder leurs succès.

Le second genre dont j’ai parlé & qui s’exerce à représenter desactions communes, mais vraies, se sous-divise en une infinité de branches qu’il est inutile de parcourir. En général, les peintres de cette classe doivent conformer leurs draperies aux modes régnantes, en donnant aux


vêtemens qui sont à l’usage des acteurs qu’ils font agir, toute la grace dont ils sont susceptibles, & la vérité qui peut en indiquer les différentes parties.

Je passe à l’ordre le plus distingué : c’est celui des artistes qui représentent des actions nobles, vraies ou fabuleuses ; on les appelle peintres d’histoire. Cette loi de convenance que j’ai recommandée, les oblige à s’instruire dans la science du costume. Cette exactitude historique fera honneur à leurs lumières & rejaillira sur leur talent ; car sans entrer dans une trop longue discussion, je dois dire à l’avantage des artistes qui observent avec succès la sévérité du costume, que très-souvent la gêne qu’il prescrit, s’étend sur l’ordonnance de la composition. Le génie seul est capable de surmonter cette difficulté en alliant l’exactitude de certains habillemens peu favorables aux figures, avec la grace qu’on est toujours en droit d’exiger dans les objets imités.

Ce n’est pas assez que les draperies soient conformes au costume de l’action représentée, il faut en second lieu qu’elles s’accordent au mouvement des figures ; troisièmement, qu’elles laissent entrevoir le nud du corps, & que, sans déguiser les jointures & les emmanchemens, elles les laissent deviner & sentir par les dispositions des plis.

Reprenons cette division, qui embrassera les préceptes qui me paroissent les plus essentiels sur cette partie.

L’exactitude du costume ne doit pas être portée à un excès trop gênant ; pour ne pas tomber dans cet abus, le peintre doit éviter également de s’en rapporter sur ce point aux savans qui font leur unique étude de l’antiquité, & aux gens du monde qui n’ont presque aucune idée de cette partie intéressante de l’histoire. Si, trop docile, il consulte ces hommes frivoles qui ne jugent que par un sentiment que les préjugés falsifient & qui, bornés au présent, n’ont jamais ajouté à leurs jouissances le tems. passé ni l’avenir, il habillera Cyrus indifféremment à la Romaine ou à la Grecque, & Caton, plein de l’idée de l’immortalité, se poignardant pour ne pas survivre à la République, sera paré du déshabillé d’un François de nos jours. D’un autre côté, le savant, critique, qui, passant sa vie à approfondir les, points épineux d’une érudition obscure, a émousse en lui le goût des arts & les sensations des plaisirs qu’ils procurent, sera plus choqué de voir dans un tableau manquer quelque chose aux armes que portoient les Horaces, qu’il ne sera touché de la vérité de leur action. Le milieu que le peintre peut garder, est de donner à une nation, aux Romains par exemple, les vêtemens qu’ils portoient dans les tems les plus célèbres de la République. Il seroit injuste d’exiger de lui ces recherches longues & pénibles par