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242 ÉGR ÉLÉ


un point d’unité qui en impose au spectateur.

Que le tout ensemble d’une ordonnance pittoresque joue avec son fond. Il n’importe par quel effet. Le parti sera beau toutes les fois qu’il sera nettement décidé, & que, dans la masse, il ne se trouvera point d’objets qui percent avec le champ sur lequel ils sont en opposition.

Il faut introduire dans le tableau une couleur ainsi qu’une lumière plus brillante que toutes les autres, & une nuance ainsi qu’une ombre plus vigoureuse que tous les autres tons des masses d’obscur. Ces effets ménagés pour faire la plus forte illusion, doivent être réservés pour l’endroit où se passe le plus grand intérêt de la scène. Ailleurs les accidens de lumières & de couleur seront très-modérés & ne seront sensibles, que pour relever l’éclat & la valeur de l’action principale & de l’effet dominant. Article extrait du traité de peinture de M. DANDRÉ BARDON.

Si vous voulez avoir du plaisir, (on pourroit ajouter & du succès) en peignant, il faut avoir tellement pensé à l’économie de votre ouvrage qu’il soit entièement fait avant qu’il soit commencé sur la toile : il faut, dis-je, avoir prévu l’effet des grouppes, le fond, & le clair-obscur de chaque chose, l’harmonie des couleur, l’intelligence de tout le sujet, ensorte que ce que vous mettrez sur la toile ne soit qu’une copie de ce que vous avez dans la pensée (Note de DE PILES sur le vers 442. du poëme de la Peinture de DUFRESNOY.)

EFFUMER, (v. act.) Ce terme signifie en peinture rendre certains objets moins sensibles, les moins prononcer pour qu’ils appellent moins la vue. On dit, il faut effumer cette partie, ce, contour, &c. (Article de l’ancienne Encyclopédie.) Il se peut que ce terme s’emploie dans quelques atteliers, nous le rapportons comme douteux, & nous croyons du moins qu’il est peu en usage. (L.)

ÉGRATIGNÉE, Maniéré égratignée. Espèce de peinture monochrome, ou, si, lion veut, de dessin, que les Italiens nomment en un soul mot sgraffitto.

C’est un genre de peinture qui consiste dans la préparation d’un fond noir de stuc sur lequel on applique un enduit blanc, , & en ôtant cet enduit avec une pointe de fer, on découvre par hachures le noir qui fait les ombres, ce qui forme une sorte de clair-obscur imitant l’estampe.

Les gens de l’art savent que Polydore de Caravage, qui a exécuté la plupart de ses ouvragés


à fresque & d’une même couleur, à l’imitation des bas-reliefs, s’est souvent servi, dans cette sorte de peinture, de la manière égratignée. Elle a beaucoup de force, & résiste mieux aux injures du tems que toute autre ; mais elle a un effet si dur, & si désagréable à la vue, que tout le monde a pris le parti de l’abandonner. André Cosimo, qui a le premier employé les ornemens dans les ouvrages de peinture moderne, est aussi, je crois, le premier qui a travaillé le clair-obscur dans la manière égratignée. (Article de M. le Chevalier de Jaucourt, dans l’ancienne Encyclopédie.)


Égratignée, gravure égratignée, se dip d’une gravure faite d’une manière si timide que le cuivre est plutôt égratigné que coupé. (L.)

ÉLÉGANCE. (subst. fém.) Il est des termes vagues, comme je lai déjà fait observer, qui sans être définis avec précision, sont à peu près sentis par le plus grand nombre des hommes spirituels & instruits. Le mot Élégance est de cette classe. Ce mot paroît appartenir d’origine aux beaux arts ; il est employé dans tous & s’applique, par conséquent, à des objets fort différens les uns des autres.

Dans l’architecture, on dit un bâtiment élégant, une colonne élégante, des profils élégans : dans la poésie & l’éloquence on loue un style élégant, des vers remplis d’élégance. Dans le monde, on dit aussi un jeune homme élégant & quelquefois un élégant, pour désigner celui dont le soin ou la prétention est de montrer l’élégance dans sa figure, son maintien, sa parure, enfin dans tout ce qui lui appartient, dans tout ce qui le touche ou qui l’entoure. Mais dans ce dernier sens la dénomination prend, dans l’esprit de ceux qui s’en servent, une teinte légèrement ironique, que comporte ce mot, parce qu’il est vague, à peu près comme le mot agréable, auquel il sert quelquefois de synonyme ; car dans la conversation on dit, à l’occasion d’un jeune homme frivole & recherché, qu’il est un élégant ou un agréable. Le mot élégant a, dans 1’art de la peinture, ainsi que dans l’art d’écrire, un sens plus précis. L’élégance y peut être définie, à ce qu je pense, comme une portion de la grace, jointe à une portion de la beauté ; & dans les arts, il ne se prend jamais en mauvaise part. Le peintre, pour atteindre à la beauté, doit posséder la connoissance parfaite des proportions & les justes rapports des parties entr’elles. Ce même artiste, pour saisir la grace, doit savoir mettre un parfait accord entre les affections morales simples, les mouvemens physiques qu’elles occasionnent & les traits qu’ils expriment. C’est de ces connoissances réunies que résultera la véritable