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terons de cit’et celle de Saint- Athanafe d’après K.embrandt.

Les graveurs formés pas Rubens n’eurent pas dans leur pays des fucceîïeurs dignes d’eux. Leurs eftamoes reçurent un accueil peu favorable en Italie , parce que le deffin n’en étoit ni d’un beau choix ni d’une grande pureté : on y difoit qu’elles Jentoient le flamand. Les graveurs françois , prévenus des opinions italiennes , y firent eux-mêmes peu d’attemion. Quand elles eurent enfinobtenul’eftimequ’elles méritoient , les François qui Pemporroient alors dans la gravure fur toutes les nations de l’Europe, fe contentèrent de les louer ; mais ils continuèrent de fuivre leur goût particulier , ou d’imiter ceux de leurs compatriotes qui jouiffoient d’une grande réputation,ou qu’ils avoient eu pour maître. Ainfi les travaux des Vorfterman , des Pontius , des Bolfwerr , n’eurent pas fur l’art une grande influence. Ce furent de beaux monumens qu’on fe contenta de célébrer, mais fans en faire un objet d’étude , & ils n’eurent pas d’imitateurs.

Nous avons fait connoître les graveurs imitateurs de Bloemaert , 4k ceux qu’avoient formés les leçons ou les confeils de Rubens ; parlons maintenant de ceux qui , chez les différentes nations où l’on cultivoït les arts , acquirent vers le même temps de la célébrité. (70) Claude Melian, né à Abbeville en iéoi , mort à Paris en i6S’S , commença à peindre dans la manière du Vouet dont il avoit reçu des leçons à Rome , & fe coniàcra enfuite à la gravure qu’il exerça le plus fouvent d’.iprcsfes propres deffins. Son contour eft pur , font trait coulant , fes têtes d’hommes ont du caractère , &z celles de femmes de la grâce. Il a gravé d’abord à Rome , & alors il croii’oit fes tailles comme les autres graveurs ; mais dans la fuite il s’avifa de rendre les formes & le clair-cbfcur par un feul rang de tailles renflées eu diminuées, fuivant que le ton l’exigeoit. C’eft dans ce genre de gravure qu’il s’eft fait une grande réputation , & elle auroit peut-êcre été moins brillante , s’il n’eût pas foutenu fon mérite r< el par la fingularité. On eft juftement étonné de la force qu’il a donnée à fes ouvrages avec une fi grande économie de travaux ; mais il faut convenir que c’eft fon art, & non fon procédé, qui eft admirable : il n’auroit pu manquer , avec cette manœuvre , de donner à’ fes eftampes l’apparence de l’acier, s’il avoit eu cette coupe nette & brillante dont on fait à préfenr tant de cas, . & que les amateurs préfèrent aux parties les plus importantes de l’art. Son eftampe de la Elle de Jethro , qu’il a gravée d’après le Tin-J toret, eft d’une couleur admirable , & du moelleux le plus rare : on voit qu’elle eft faite d’après un grand colorifte , on croit y recon-G R A

noître le ton du tableau, & rarement lés peintres Vénitiens ont été fi bien rendus : il n’y a croifé les tailles que dans quelques acceflbires. Dans fon eftampe de Saint-François , le travail de la robe fur les parties lumineufes exprime toute la rudeffe de l’étoffe dont eft vêtu i’auftère cénobite. Quoique la figure principale foît gravée d’une feule taille , 8c qu’il n’y ait du blanc que fur les parties frappées de la lumière, l’éftampe eft d’une grandevigueur.il a gravé, d’après fes propres deffins, des portraits dans lefqueis on croit reconnoîtrê la couleur de la perfonne repréientée. On peut comparer le portrait de Peirefc , affez bien gravé fuivant le procédé ordinaire , dans le recueil des hommes illuftres de Perraut, & celui que Melian a traité d’une feule taille ; l’avantage de la couleur eft en faveur du dernier. Tout le monde connoîc fa Sainte-Face, grande comme nature, & gravée d’une feule taille tournante qui commence au bout du nez. C’eft un jeu d’adreffe que les amateurs ne cefïent de célébrer ; mais ce n’eft pas le plus beau de fes^ ouvrages : on eft fâché qu’un artifte d’un fi grand taient doive la plus grande partie de fa gloire à un femblable tour de force , auquel il ne mettoit peut-être que fort peu de prétention. Il a eu la patience de faire deux fois à la plume le deffin de cette tête ; on peut voir l’un de ces deffins au cabinet des eftampes de la bibliothèque du Roi. ( 71 ) Jean-Jacques Thourneysen néàBâle en 1636 , & mort dans la même ville en 1718, a gravé dan3 la manière de Melian. Il y a de la grâce dans fon eftampe ronde gravée d’après Charles Dauphin , & repréfentant la Vierge, l’Enfant- Jéfus &le petit Saint-Jean. Cet ouvrage eft de l’année 1663.

(72) Rembrandt Van- Rhin. Nous avons déjà parlé de ce grand maître à l’article Ecole. Une liberté vagabonde, un defordre pittorefque, une touche facile , la plus, rare intelligence du clair-obfcur , le talent de rendre par des travaux jettes en quelque forte auhafard, le caractère des dsftsrens âges, & celui de tous les objets qu’il traitoit , telles font les parties , & beaucoup d’autres encore, qui répandent fur les eftampes de Rembrandt un charme inexprimable. On cherche fes procédés , & je ne les crois pas fort difficiles à trouver ; c’eft fon art qui eft un fecret Lmoénétrable. Il eft certain qu’il a beaucoup employé la pointe-sèche ; quelquefois, il l’ébarboit imparfaitement , & fes rebar» bes arrêtant en partie le noir, lui procuraient des tons de lavis : fon heureufe maladrefle à aiguifer fa pointe , à la manier , lui fourniffoit des travaux & des tons fingulièrement pittorefques. Il faifoit aufTi quelquefois ufage du burin , mais plus rarement. Loin de chercher à le rendre brillant , il ne l’employoit que pour peindre , facrjfier ? falir , & ne cherehoit qu’à