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43* JET

» le cabinet du prince de Lichtenfteîn à Vienne : » elle eit barbue -, mais elle porte l’empreinte » de la plus haute beauté virile , & on pe ut » la recommander comme le plus parfait m dèle ».

Nous ne croyons pas qu’on puifle hafarder de repréfenter le Chrift fans barbe , parce que les Juifs de fon temps n’avoient pas coutume de fe rafer. Mais fi la tête de Chifi du Vinci efl : digne des éloges que lui accorde Winckel-Ji >ann , il feroit à délirer qu’elle fût rendue publique par une gravure très-précifê. Ce modèle ns feroit pas inutile aux artiftes , & i] en eft peu qui puiffent l’aller confulter à Vienne. ( Article de M- Levesquei : (

JET. ( fubft. mafe. ) Le Jet des draperies. Il efl porté au plus haut degré de perfection , quand les étoffes font difpofees de manière qu’elles paroiffent jettées par la nature elle même. Ce mérite fuppofe de l’imagination , du goût , & un elprit jufte. Car lorfque la raison ne guide pas le fculpteur ou le peintre dans cette partie effentielle de leurs arts , ils ne produifent que des draperies fantaftiques qui peuvenc plaire un infranc, parce qu’elles ont d’extraordinaire, mais qui , regardées avec un peu d’attention , dfeplail’ent bientôt à quiconque a l’amour du vrai. En parlant de la manière fauffe de draper , les onvrages de de Vos , de àti adan , de Golzius reviennent à l’efprit. Ces artiftes ne s’occupoient que de contraires & : de mouvemens violens , & ils ont fait des draperies dont le jet étoit oppofé à l’action de leurs figures. Mais fans nous arrêter aux fingularités de ces peintres d’un exemple dangereux , occupons-nous des moyens par lefquels les grands maîtres ont réufli dans le jet de leurs draperies : ils y ont mis du naturel, de la variété, de l’ordre, de la gradation & de la grâce.

Le naturel fe trouve par le principe fïmple & précieux , qu’une étoffe doit être jettée , de manière qu’on life fans peine fa marche furie corps qu’elle enveloppe , & qu’il femble qu’en ]a prenant par un coin , on puifTe en dépouiller la figure qu’elle habille.

Quelque vraie que paroiffe cette méthode , quelque connue qu’elle foit, rien néanmoins n’eft plus commun que de trouver, même dans de fort bons tableaux, des figures dont on a peine à fuivre la marche du vêtement. Bien entendu que l’on ne parle ici que des vêtemens antiques. Car nos habits modernes fe failifTant de toutes les parties du corps, & n’ayant ni jeu ni ampleur , on conçoit qu’ils ne font pas fuiceptibles d’un grand choix dans la manière de les pofer fur le corps.

Le mouvement de la figure doit déterminer la nature des plis ; ainfi lorfqu’elle eft tranquille , l’étoffe doit être pofee Amplement ; quand JET

il y a de l’action , le jet de l’étoffe doit y participer & indiquer le degré de fon mouvement-Le jet fera auffi déterminé par la nature des vêtemens , qui doivent varier félon le pays le rang , l’âge & le fexe de la figure. Dans le jet , il faut obferver un ordre relatif aux parties du corps que recouvre la draperie. Tantôt elle doit fuivre abfolument les formes principales des membres , tantôt fervir à les groupperavec le refte du corps quoiqu’elles en foient écartées. Par l’ordre des plis , on grandit, ou on diminue les maffes des ombres 6c des clairs ; on indique les articulations , & en careffant les diverfes parties du corps , on augmente encore leur action , bien loin de l’ai :foiblir.

Il y a une gradation à obferver endettant les étoffes. Cette gradation efl : relative à la taarche générale de la compofition , & à l’attitude de chaque figure en particulier. On étend ou on refîerre les vêtemens fur les acteurs d’une fcène pittorefque , félon le degré d’intérêt & de lumière ou d’ombre qu’elles doivent produire. La gradation du^Vt des draperies , relatif à chaque figure, peut être mieux placée en parlant de l’ordre des plis , & c’efl : à cet article que nous renvoyons le lecteur.

Quoique la grâce dans le jet des draperies femble dépendre de celle qui fe trouve dans les figures qu’elles couvrent , il exifte cependant une grâce abfolument propre à l’art de draper. On trouve de la grâce dans un rideau retrouffé, ou dans un manteau jette’ fur un meuble, lorfque leur mouvement eft doux , qu’il contraire & cependant s’enchaîne avec les objets qui les avoifinent. C’efl : dans ce cas fur-tout que le hafard , le caprice , une main henreufe offrent des fuccès qu’un froid raifonnement n’auroit pas produit.

Mais cette grâce qu’on fenc, & qu’on ne rencontre , comme nous l’avons dit , que lorsqu’on ne la cherche pas , devient ftyle manière quand on veut la commander. Ainfi Pierre Êerettini de Cortone, à force de vouloir, par fes draperies, carefler avec grâce les membres de fes figures, finit par les mafquer, & par dénaturer le caractère des étoffes ; Michel-Ange , par un excès oppofé , ne "voulant rien perdre de fes grandes formes , colloit fes draperies fur le corps plutôt qu’il ne les jettoit. On auroit de la peine à rien citer de plus parfait dans l’art de difpofer ou de jetter les draperies, que les ouvrages de Raphaël ; vrai, fïmple , grand, gracieux , varié félon le caractère & l’exprefiion de chaque figure, il pourroit feul fournir la matière d’un long traité fur l’arc de jetteriez étoffes.

Maison a déjà parlé du talent fuprêmedece grand maître danscette partie àl’article Draper. ( Article de M. Robi.ît.)