Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/670

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

M Y O qu’il répétoit une sonate de Corelli, parce qu’il vouloit faire son tableau dans le style de ce célèbre musicien. Comment le style d’un tableau peut-il être celui d’une sonate ou d’une symphonie ? c’est ce que sentoit l’âme de Mengs ; c’est ce que comprendront les personnes sensibles aux effets des deux arts, & ce qu’on expliqueroit vainement aux autres. (Article de M. Levesque.)

Myologie (subst. fem.) En sciences des muscles. M. Watelet à renfermé, Dans l’article FIGURE, Ce Qui Est Le Nécessaire en plus aux artistes d’en savoir.

MYSTÈRE (subst. masc.) Ce mot employé dans le sens de secret est un moyen rarement pardonnable dans les arts. On a cependant excusé Van-Eyck d’avoir usé secrètement de la découverte qu’il fit de la peinture à l’huile, parce qu’elle lui procura de grands avantages. Les premiers inventeurs de la gravure firent, par les mêmes motifs, mystère de leur manière d’opérer ; enfin ceux qui ont trouvé le secrèt d’enlever les peintures à l’huile faites sur le mur ou sur le bois, pour les transporter sur une toile neuve, tels que Picaut & Hacquin, ne peuvent être blâmés d’unmystère qui donne de la valeur à leurs recherches. Mais le mystère est coupable, & en même temps ridicule & bas, de la part d’un artiste, soit qu’il ait découvert quelques principes relatifs à l’art, soit qu’il ait trouvé des nouveautés dans les moyens pratiques. Aussi pensons-nous qu’il seroit impossible de voir un homme pénétré de connoissances un peu étendues sur l’art, faire mystère d’une petite découverte de couleurs, de vernis, ou ce qui seroit pis encore, d’une méthode utile à l’avancement des jeunes artistes & même à la perfection des autres. Ce seroit s’avouer bien inférieur que de faire ainsi dépendre ses succès d’une ressource si misérable. S’il existoit des hommes capables de pareilles puérilités, assurément ne ce seroit pas des hommes d’un mérite distingué.

Le mystère considéré comme qualité d’un ouvrage de l’art, n’est guere applicable qu’à la disposition des sujets & aux effets de la lumière. Une composition dans laquelle il entre du mystère pittoresque est ordinairement employée à la représentation d’une scêne douce & paisible. Ainsi on trouve du mystère dans le tableau de le Brun, ([1]) où l’enfant Jesus, avec Joseph & Marie, prie Dieu avant son repas ; on en trouve dans la lecture de la lettre, vie de S. Bruno par le Sueur ; enfin dans


le tableau d’Annibal Carrache de la collection du Palais-Royal, appellé le raboteux, où l’enfant Jesus tire le cordeau avec S. Joseph, tandis que la Vierge travaille de l’éguille. Le grouppe antique qu’on a nommé Papirius & sa mère, jusqu’à ce que Winckelmann ait établi des doutes fondés sur cette dénomination, est une composition d’autant plus mystérieuse qu’il entre aussi du secret dans le sujet.

Nous remarquerons que l’on n’applique presque jamais l’attribut de mystériiuxà une composition d’une seule figure, quelque rapport qu’ait son action avec l’idée que fait naître cette expression de l’art. Il n’y a guere de mystére sans une correspondance d’actions ou de passions douces ou silentieuses.

Une scène, quoique nombreuse en figures, inspire nécessairement le sentiment du mystère quand l’action représentée est mystèrieuse de sa nature ; il est peu d’ames sensibles sur qui la composition poëtique de Sebastien Bourdon qui représenta les Prophêtes se cachant & se recommandant un silence mutuel pour éviter la fureur cruelle de Jezabel, ne produise l’impression du mystère. Mais il n’est guere de tableau qui rapelle plus fortement cet effet pittoresque que le mourant Eudamidas du Poussin.

Le mystère de composition ne peut se rencontrer que dans le style noble & simple. Aussi nous ne croyons pas qu’on puisse citer beaucoup de compositions mystèrieuses dans les œuvres riches & fastueuses des Paul Veroneses, des Layresses, des Rubens, ni même dans celles des peintres dont le style est nerveux, fier & ardent comme sont Ribera, Jules, Michel Ange, tandis que Raphael, Sacchi, Poussin, le Sueur en offrent de nombreux exemples.

L’effet de la lumière & des ombres bien entendu, distribué d’une manière douce & harmonieuse, dans un coin ou dans l’ensemble d’un tableau, y répand du mystère. Soit que l’action soit vive ou paisible, soit qu’elle soit simple ou compliquée, on peut y introduire un effet mystèrieux. Ainsi, il y a du mystère dans la nuit du Corrège, dans la mort du S. Bruno par le Sueur, dans l’estampe du Bourgue-mestre de Rimbrand, & dans beaucoup d’autres ouvrages de cet artiste ingénieux.

Une lumière unique & rare, soit naturelle, soit artificielle comme celle d’une lampe ou d’un flambeau, est capable de donner seule ce qu’on nomme du mystère dans l’effet d’un ouvrage de peinture.

Dans une scênc d’ailleurs fort éclairée, il y a des coins susceptibles d’un effet mystèrieux. C’est ainsi, que Rubens l’a fait sentir dans le coin du tableau du couronnement de Marie de Médicis où Henri quatre se trouve dans une tribune, simple spectateur de cette cérémonie

  1. Eglise St. Paul, à Paris.

Beaux-Arts. Tome I. Y y y