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POE

les artlftes de l’être : ils trouveroîent en abondance de ces idées dans les livres ; des gens • d’efprit pourroient leur en communiquer : mais ni les livres, ni les gens d’efprit ne feront jamais qu’un artifte Ibit poëte, fi la nature lui a refufé de l’être.

Pour reconnoître fi un artifte eft poëte, n’examinez donc pas fi l’invention de ("on ouvrage efb poétique ; cette invention peut ne lui point appartenir. Mais s’il a bien exprimé fon fujet, alors il l’a fait, il l’a créé ; il eft foëte.

Le Corrège, dans fon tableau d’Io, a été un grand poëte, puifqu’il a ii bien exprimé fon fujet, que le Duc d’Orléans, arrière-neveu de Louis XIV, a cru, par un fcrupule religieux, devoir détruire ce chef-d’œuvre. L’artifte a joint à ce fujet un acceffoire poëtique, en exprimant, dans un coin du tableau, l’ardeur des deux amans, par la foif ardente d’un cerf qui fe défaltère dans une fontaine. Cette idée eft ingénieufe , on y reconnoît de la voëfie : mais que devenoit cette po’éjie acceffoire , fi le fujet principal avoir été médiocrenienc traité ?

Il faut donc faire une grande différence de la poejîe mythologique, ou allégorique, & de lapoëjîe pittorefque. La peinture même hiftorique peut emprunter des richeffes ala poëjie mythologique : mais cette richeffe perdra fa valeur , fi le fond du fujet n’eft pas exprimé fuivant la po’éfie de l’art. On ne conteftera pas à Rubens la qualité de peintre poëte : il a fait un bien plus grand ufage de la. poéjie mythologique que Raphaël , & cependant il eft bien moins poëte.

Je lis & j’entends qu’on place quelquefois la. po’éfie dans la facilité de produire un grand nombre de figures, de les agencer, de les groupper, de les détacher, de les varier, de les faire contrafter> de diftribuer fur elles de belles malles d’ombre & de lumière ; & tout cela n’eft pas plus ce qu’on doit appeller la poéfie pittorefque, que l’art de ranger fur le théâtre des aéleurs parlans & muets pour faire ce qu’on appelle des tableaux fur la fcène , ne doit être appelle de la po’éfie dramatioue. Jin gênerai, a talens a peu près égaux, les peintres qu’on appelle grands machiniftes me paroiffent les moins poètes de tous, parce que ce Ibnt ceux qui ont le moins cherché à exprimer convenablerhent leur fujet. Cette expreffion convenable fe trouve bien plus chez les peintres qui ont traité leur fujet avec le moindre nombre de figures pofllble, parce qu’ils fe font plus attaches à les rendre belles, & à exprimer les affedions dont elles doivent Être animées.

Combien il étùit poëte, l’artîfte grec qui ,)|réé l’Apollon du Vatican } Coin ;nent un peintra

peintre,

P O I.

occupé à remplir de figures une grande machine, : auroit-il le temps de penfer & : de produire un morceau d’une fi belle po’éfie ? La po’éfie dont j’ai parlé jufqu’ici efl celle que je crois pouvoir appeller d’expreflion , parce qu’elle confifte à bien exprimer le fujet. La peinture a aufli fa po’éfie de ftyle , qui confifte dans un emploi élégant 8c pur du langage de l’art. Ce langage eft formé par la couleur & l’effet que l’on peus comparer aux fons dans la ^oéy ?e écrite, & parla difpofition qui répond a l’arrangement des mots & des phral’es. L’artifte qui poflederoit la po’éfie d’expreflion, & à qui m«nqueroit la/^oè/Zê de ftyle de fon art, feroit femblable à un poëte qui fauroit mal fa langue. L’un rebuteroit les lefteurs, l’autre auroit peine à fijier les fpeftateurs. ( L. ) POINTE, (fubft. fem.) inftrument dont on fe fert pour graver à l’eau- forte. Comme on emploie le mot p’mc^au pour exprimer la manière du peintre, & qu’on dit par exemple que le Corrège avoir un beau pinceau , un pinceau moelleux , pour faire entendre qu’il peignoir d’une belle manière & moëlleufement ; on fe fert auili du mot pointe pour exprimer la manière d’un graveur à l’eau-forte : ainfi l’on dit que Callot avoit une pointe ferme & fpirituelle ; la Belle , une pointe fine & badine ; Rembrandt & le Benedette, une peinte favante & pittorefque. Pour exprimer le défaut d’un graveur à l’eau-forte dont la gravure n’a rien de moelleux & femble égratignée, on dit qu’il a une pointe maigre. C’eft : de même à la pointe qu’on rapporte la timidité mal-adroite de la main qui la rient, & l’on dit : qu’une planche eft gravée d’une pointe timide. L’emploi le plus ordinaire que l’on fait de la pointe en gravure , ell fur un vernis dont le cuivre eft couvert : elle enlève alors le vernis, & fiUonne peu profondément le cuivre : mais on l’emploie quelquefois fur le cuivre nud, & alors on la nomme pointe-fèche. On la réferve pour les travaux tendres , qui doivent avoir un ton doux & argentin. Elle doit , pour cet ufage , être bien tranchante (L), POMPES FUNEBRES. Nous commencerons cet article par la defcription à’iine pompe funèbre, qui fe trouve dans le Voyagi du jeuni Anacharfis. M. l’Abbé Barthélémy a répandu les grâces fur ce tableau lugubre. Nous entrerons enfuiie dans quelques détails néceffaires aux arciftes ; ce fera un aride commentaire de cette élégante defcription. c< En forçant de la paleftre , nous apprîmes » que Télaïre, femme de Pyrrhus, parent & » ami d’Apollod»re, venoit d’être attaquée d’un » accident, qui menaçoit fa vie. On avoit vil » à fa porte les. bratiches de laurier & d’4-5