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•rrage, & qu’elle exige, à jufle tïtre, notre eftime & notre admiration.

On peut produire comme une preuve de la grande valeur que nous attachons à la beauté des formes, la plupart des ouvrages de peinture & àe fadptUT e de Michel-Ange , & un nombre confidérable de ftatues antiques, qui jouiflent d’une admiration iuftement méritée, quoique d’ailleurs elles n’offrent pas un caradère bien déterminé ni une fort grande expreflîon. Mais pouy prouver plus fortement encore que la beauté feule des formes fuffit pour frapper l’efprit, i’obferverai qu’il n’y a jamais eu de

véritable artiite qui ait porté les yeux fur le torfe

fans éprouver le feu de l’cnthoufiafme , comme à la lecture de la plus fublime pièce de poëfie ; • A quoi cela peut-il être attribué’ Quel charme fecret y a-t-il dans ce fragment antique, & qui peut produire un tel effet, fi ce n’efl la perfeflion des formes idéales ? Un efpric ’.accoutumé à la contemplation de la beauté, i apperçoic dans ce tronc mutilé & dégradé ^//^

jecli memb ra poètœ , les vertiges du plus fublime

i génie, les reftes d’un ouvrage que les fiècles [futurs ne pourront jamais afl’ez admirer. j On dira, peut-être ,que ce plaifir n’efl : réfervé ïqu’àceux qui ont paffe toute leur vie dans l’étude 1 & la contemplation de cet art. Je répondrai I d’abord que toutes les perfonnes qui ne font .pas entièrement ignorantes dans les arts qui dépendent du deffin , pourroient également éprouiver les effets de ee morceau, fi elle.s vouloient , dépouiller toute idée d’y trouver aucune illu-

fion, & n’y chercher que ce qui s’y trouve

[véritablement, une repréfentation partielle de

!!a nature. J’ajouterai que , quoiqu’on en puifle 

idire, les perfonnes ignorantes en mufique ne |fentent pas toujours l’effet des plus beaux ouvrages de cet art , & qu’il faut une longue

étude pour appercevoir le butdes différentes com-

.binaifons des élémens qu’il emploie.

La fculpture efl un art borné en comparai-

■ fon de quelques autres arts ; mais il a néanmoins fes difficultés ,& , dans les limites qui lui font propres, il a des combinaifons nombreufes & très- variées.

L’effence de Va. fculpture confifte dans la correftion. Quand à la corredion des formes, fe .trouvent joints le charme de la grâce, la’no- ^bleffe du caraâère, & la vérité de l’expreflion , comme dans l’Apollon, la Vénus de Médicis, le Laocoon , le Mo5 :fe de Michel- Ange, & plufieurs autres ouvrages , on peut dire que cet ’art a parfaitement rempli fon but. Il eft difficile de déterm’ner par la théorie ce que c*eft que la grâce , & comment on peut l’acquérir ou s’en former une idée-, mais caufa latet, les efl notifjlma : on en apperçoit con- ^tinuellement l’effet, fans fe livrer à des recherches pénibles ; & quoique la grâce puifle lieaux-Ans. Tome IL

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fe trouver quelquefois unie à l’încorreflion , on ne peut jamais prononcer qu’elle en foie une conféquence.

Je fais qu’on a fouvent cité le Cortège & le Parmefan pou.r prouver que la grâce eft, chez eux du moins, une fuite de l’incorreftion ; mais la moindre attention doit fuffire à convaincre que l’incorreftion de quelques parties que l’on remarque dans les ouvragés de ces deux maîtres , loin de faire naître la grâce, fert plutôt à la détruire.

Une Vierge du Parmefan que l’on voit avec l’enfant endormi & un charmant grouppe d’anges, dans le palais Pitti, eft rempli de grâce : mais cette grâce feroit encore plus parfaite & plus belle fi le peintre, au lieu d’avoir fait le cou, les doigts & les autres parties trop longues, & incorreftes, leur avoir donné leurs juftes proportions.

Mais pour nous renfermer dans des ouvrages àe fculpture , on a dit que l’élégance de l’Apollon dépend d’un certain degré d’incorreftion ; que la tête ne fe trouve pas placée entre les épaules, & que la moitié inférieure de la ftstue eft plus longue que ne le permet l’exafte proportion

Je puis répondre que la première de ces affertions critiques n’eft pas vraie d’après l’autorité d’un fort habile fculpteur de cette académie {l’académie royale de Londres) qui. a copié cette ftatue, & qui, par conféquent , l’a examinée & mefurée avec beaucoup de foin. Pour réfuter la féconde afferrion , il faut fe rappeller qu’Apollon eft repréfenté ici comme exerçant une de fes qualités particulières, la vélocité, & que, par conféquent, l’arcifte lui a donné les proportions les plus propres à faire naître l’idée da ce caraftère II n’y a donc pas plus d’incorre£lion dans ces formes fveltés , qu’il n’y en a dans les mufcles fortement prononcés de l’Hercule , qui fervent à lui donner le caradère de la vigueur.

La fuppofition qu’on peut produire la grâce par la difformité, eft un poîfon pour l’eTprit du jeune artifte , & peur le porter à négl-ger ce qui eft effentiel à fon art , la correélion du deffin, pour s’attacher à un phaniôme qui n’a d’exiftence que dans l’imaginât on déréglée de ceux qui prétendent trouver" partout de l’idéal & du fur humain.

Je ne puis quitter la ftatue d’Apollon fans vous communiquer une r flexion qu’elle m’a fuggérée. On fuppofe que ce dieu eft repi’é'enté au moment qu’il vient de décocher une flèche , contre le ferpent Python, & que la tête, un peu tournée vers l’épaule droite , indique qu’il eft attentif à l’effet qu’elle produit. Ce que je veux remarquer ici, c’eft la différence qu’on obferye entre cette intention du. dieu & celle G c c