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le fond du tableau , pour exprimer les blancs & les clairs ; ce qui étoit fort ûiflicile dans les petites parties , & rendoitla peinture féche & dure : au moyen des couleurs que nous allons donner, on eft en état de compoler unaufli grand nombre de difFërentes teintes que les peintres à l’huile. Ainfi l’on pourra peindre franchement & (ans être obligé de réferver les fonds. On place les clairs Se les reflets où ils font néceflaires , ce qui donne un empâtement moelleux à la peinture, & procure la facilité de copier avec précifion tous les tableaux de quelque genre qu’ils puiffent être.

Dds Fondans. Tous les difFérens genres de peinture , excepté la peinture en paftel , exigent une matière liquide , qui mêlée avec les couleurs , en lie toutes les petites parties les unes aux autres , & les rendent capables d’être appliquées avec le pinceau ; ce liquide venant à lécher, attache les couleurs ftir le fond, & leur donne de la confiftance. Les huiles , les gommes , les colles, &c. s’emploient ordinaiiement pour cet ufage : l’huile effentielle de lavande efb ce quiréuiïit le mieux dans la peinture en émail. Mais comme il eft abfolument néceffaire que cette huile foit totalement évaporée avant de porter i’ouvi’ageen fjnte, il faut une autre matière qui lie les couleurs à l’émail blanc , fur lequel on peint, & qui les y fifle pénétrer dans le moment de la fution. Cette matière ne pouvant être autre choté qu’un ve-re , il elt à propos d’examiner de quelle nature il doit être, & : les qualités qu’il doit avoir pour remplir l’objet qu’on le propoie.

On fera furpris qu’après avoir profcric, il n’y a qu’i :n infiant, de la peinture en émail, tout ce que l’on peut regarder comme verres colorés , à caufe de la grande difficulté que l’on trouve à les employer au pinceau , on propofe ici de mêler du verre avec les couleurs ; mais il faut faire atte.Ttion que les couleurs auxquelles on le mâle , n’étant point vitrifiées, fervent de njoyen d’union entre l’huile de lavande <V le verre ; d’ailleurs , fl à deux matières difficiles à mêler ehfembie par la trituration, on en joint une troifiéme qui tienne un milieu entre les deux pi’eraières , ces trois matières fe mêlent ik i’e broyent beaucoup plus parfaitement. C’efr préciftment ce qui arrive ici,& l’expérience prouve que fila quantité du verre que l’on mêle avec les couleurs n’excède pas le poids des couleurs de plus de fix ou iept fois, elles coulent avec l’huiie au pinceau , !k. font fort aifces à employer.

Le verre que les artifies ont appelle Fondant , & : qu’on nommera ainfi dans tout le cours de cet ouvrage , eft de la plus grande importance dans la peinture en émail. C’eft lui qui donne de la liaifon & de l’éclat aux couleurs ; c’eft lui qui le,s fait pénétrer dans l’émail blanc du fond fur E M a :

lequel on peint , & qui , par ce moyen , en ren<î la beauté & la vivacité éternelles. Pour remplir ces conditions , il doit avoir plufieurs qualités, dont on va donner le détail.

I °. l-e fondant doit être général , c’eft-àdire, qu’il doit fervirà toutes les couleurs, quoique celles-ci foient tirées de différentes fubftinces ; il doit donc entter en fuflon avec toutes ces-qouleurs au même temps & dans le même inftant. S’il entroit en fuiion plutôt ou plus tard avec une couleur qu’avec une autre, on ne réulTiroit plus dans les mélanges qu’on eft obligé de faire des couleurs, pour produire les différentes nuances dont on abefoin. Il faudroit réferver de certaines parties de l’ouvrage, qui ne pourroit plus fe faire également & uniformément.

". Le degré de fufibilité àa fondait doit être proportionné à celui de l’émail du fond furiequel on peint ; il ell même effentiel qu’il Ibit un peu plus facile à mettre en fufion que cet émail. On lait que de deux corps qui le touchent , (î l’un eft plus ai fé à fondre que l’autre , la fuflon de l’un entraîne dans le moment celle de l’autre. La f^fion des couleurs entraînera donc celle du fond, & les y fera pénétrer. Au lieu quefi l’émail du f :nd entroit en fonte le premier , les couleurs qui auroient déjà paffé au feu pourroient en fouffrir , & la furface de celles que l^on viendroit de coucher ne prendroit pas le Uiilant : & le poli qu’elle devroir avoir. Au contraiie , fi e fondant le mettoit en fufion trop promptement, il ne pourroit pénétrer l’émail dufond, les couleurs refteroient defius , & formeroient un relief, ce qui produiroit un mauvais effet.

°. Le fondant doit être clair, net, tranfparent & inattaquable par tous les acides. S’il avoic de la co.ileur , il la communiqueroit aux matières colorées avec lefquelles on le mêleroit ; s’il pouvoir être attaqué par quelqu’un des acides , il le feroit à la longue par celui de l’air , qui terniroit enfin l’éclat de ; couleurs ; d’ailleurs , il ne feroit pas poflible d’expofer les ouvrages à l’eau féconde, pour les dérocher , fans couvrir la peinture de cire , ce qui fait une manœuvre peti sûre & fort embarralîante pour les artifies °. Il ne doit point entrer de plomb dans la compofltion du fondant ; on en doit bannir par confjquent le minium, le fucrc de Saturne, la • litharge, la cerufe • &c. en un mot , toutes les préparations dans lefquelles il entre du plomb , ou qui en font tirées. Ce métal , mêlé avec du fable & des Tels, le vitrifie très-aifement dès qu’on l’expofe au feu ; mais il le revivifie, ou { ce qui efc la même choie) il reprend fon état de métal avec beaucoup de facilité : l’air fuffic même quelquefois pour le revivifier, fans qu’il foit belbin du feu. C’eft à cette révivification du plomb qu’il faut attribuer en partie les changemens que l’air apporte dans la peinture à l’huile,.