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(130) Aniello Falcone, de l’école Napolitaine, né à Naples en 1600, fut élève de Ribeira. Il se livra au genre des batailles, & fut nommé l’oracolo delle bataglie. Sa couleur étoit vigoureuse & sa touche légère. Il fut imité par le Bourguignon, & vit les plus habiles artistes de son temps se disputer la satisfaction de possèder de ses ouvrages. Il mourut en 1680 à l’âge de quatre-vingt ans.


(131) Michel-Ange Ceraquozzi dit Michel-Ange des Batailles, de l’école Romaine ; on le nomme aussi Michel-Ange des Bambochades, parce qu’il a beaucoup travaillé dans ce genre. Il naquit à Rome en 1602. Il fut d’abord élève d’un peintre Flamand, & ensuite d’un Italien, qui avoit une grande réputation pour peindre les fruits, & lui-même excella dans ce genre d’imitation ; lorsqu’il se fut lié avec Pierre de Laar, qu’on appelle Bamboche, il se plut à traiter le genre dans lequel son ami se distinguoit ; il a peint aussi l’histoire, mais avec moins de succès.

Ses tableaux étoient animés de toute la gaieté de son caractère ; c’étoient des comédies muettes. Sa touche était légère & sa couleur vigoureuse. Il avoit la mémoire excellente & l’imagination vive. Il suffisoit de faire devant lui le recit d’une bataille ou d’une scène comique, pour qu’il en traçât le tableau. Tout ce qu’il entendoit, il le voyoit. Ses esquisses n’étoient tracées que dans son esprit, & il les transportoit sur la toile. Il ne se piquoit cependant pas d’une vitesse dangereuse, & mettoit le temps convenable à terminer ses ouvrages. Il étoit le peintre à la mode de son temps : chacun vouloit avoir de ses tableaux.

C’étoit un homme de bonnes mœurs & de bon esprit, disant même du bien de ceux qui déprisoient ses ouvrages. On ne pouvoit lui reprocher que son amour de l’argent. Il en avoit beaucoup, & fit pour le cacher un long chemin dans la campagne, jusqu’à ce qu’il eût trouvé un endroit qui lui semblât sûr, revint, puis sur quelques soupçons retourna aussitôt sur ses pas & prit tant de fatigue qu’il se détruisit la santé. Rien ne put la rétablir & il mourut à Rome en 1660, âgé de cinquante-huit ans.

Il n’y a de lui qu’un seul tableau au cabinet du roi, & il n’est pas de son bon temps. Il représente un opérateur Italien. On voit au palais-royal une mascarade de sa main.


(132) Philippe de Champagne, de l’école Flamande, né à Bruxelles en 1602, n’eut que des maîtres fort médiocres & se forma de lui-même. Il vint à Paris à l’âge de vingt ans & fut surintendant des bâtimens de la reine. Il fut long-temps en France le peintre le plus occupé & de la plus grande réputation : des


travaux nombreux faits pour la cour pouvoient lui faire espérer la place de premier peintre du roi : cependant quand elle fut donnée à Lebrun qui revenoit tout nouvellement d’Italie, il ne s’en montra pas jaloux. Si cette place devoit être la récompense des anciens services, Champagne y avoit des droits ; si elle devoit être le prix du mérite, Lebrun l’emporta justement.

Champagne imitoit la nature sans choix & sans chaleur. Il rendoit bien son modèle, mais il ne lui donnoit pas le mouvement. Nous n’entendons pas ici par mouvement, des attitudes violentes, mais ce qui donne l’action, le sentiment, la vie aux ouvrages de l’art. Son dessin étoit assez correct, mais peu élégant ; sa couleur étoit bonne. Il auroit joui d’une réputation plus durable, s’il n’avoit fait que le portrait. Il est mort à Paris en 1574 à l’âge de soixante & douze ans.

On voit dans Paris un grand nombre de ses ouvrages, & ils prouvent qu’il étoit un de ces maîtres à qui l’on doit beaucoup d’estime, s’ils n’excitent pas d’enthousiasme. Il ne lui a manqué, pour mériter l’admiration, que la chaleur qui lui avoit été refusée par la nature. Ses tableaux des Carmelites de la rue Saint Jacques, & tant d’autres, sont de bons ouvrages : c’est un très bon ouvrage que son Saint Philippe en méditation, dans les salles de l’académie royale de peinture ; son portrait, fait par lui-même, est l’un des plus beaux qui se voyent dans ces salles.

Cet excellent tableau a été gravé supérieurement par Edelinck, qui a gravé aussi la Samaritaine. Pitau a grave d’apres le même peintre un Saint Bruno.


(133) Jacques Van Oost, surnommé le Vieux, de l’école Flamande. On fait qu’il est né à Bruges, mais on ne sait pas précisément en quelle année il y vit le jour. Cet habile artiste n’est point connu des étrangers, parce que ses ouvrages, faits pour les églises ou les hôtels-de-ville, ne sont pas sortis de la Flandre.

Ses maîtres sont inconnus ; il leur dut moins, sans doute, qu’à ses dispositions naturelles & à ses études : mais on sait qu’il se fit estimer, dès la première fois qu’il se fit connoître. Les applaudissemens qu’il reçut ne l’aveuglerent pas sur ce qui lui manquoit encore : plus éclairé que ses admirateurs, il voyoit loin de lui le but auquel il se proposoit d’atteindre, & pour marcher plus sûrement dans la carrière ouverte par les grands maîtres, il entreprit le voyage d’Italie. Annibal Carrache fut le maître qu’il se proposa pour modèle, & il l’imita d’assez près pour étonner les Italiens. Il avoit l’art de se transformer en quelque sorte dans les artistes qu’il prenoit pour objets d’imitation ;


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