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ARC
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Telles ſont les couleurs, qu’un ſeul globule de pluie doit repréſenter à l’œil : d’où il s’enſuit qu’au grand nombre de ces petites globules venant à ſe répandre dans l’air, y fera appercevoir différentes couleurs, pourvu qu’ils ſoient tellement diſpoſés que les rayons efficaces puiſſent affecter l’œil ; car ces rayons ainſi diſpoſés, formeront un arc-en-ciel.

Pour déterminer maintenant qu’elle doit être cette diſpoſition, ſuppoſons une ligne droite tirée du centre du ſoleil à l’œil du ſpectateur, telle que VX, figure 67 que nous appelerons ligne d’aſpect : comme elle part d’un point extrêmement éloigné, on peut la ſuppoſer parallèle aux autres lignes tirées du même point ; or, on ſait qu’une ligne droite qui coupe deux parallèles, forme des angles alternes égaux.

Imaginons donc un nombre indéfini de lignes tirées de l’œil du ſpectateur à l’endroit oppoſé au ſoleil où ſont des gouttes de pluie, leſquelles forment différens angles avec la ligne d’aſpect, égaux aux angles de réfraction de différens rayons réfrangibles, par exemple, des angles de 41 degrés 46 minutes, & de 41 degrés 30 minutes, & de 41 degrés 40 minutes, ces lignes tombant ſur des gouttes de pluie éclairées du ſoleil, formeront des angles de même grandeur avec les rayons tirés du centre du ſoleil aux mêmes gouttes ; de ſorte que les lignes ainſi tirées de l’œil repréſenteront les rayons qui occaſionnent la ſenſation de différentes couleurs.

Celle, par exemple, qui forme un angle de degrés 46 minutes, repréſentera les rayons les moins réfrangibles ou rouges, des différentes gouttes ; & celle de 41 degrés 40 minutes, les rayons violets qui ſont les moins réfrangibles. On trouvera les couleurs intermédiaires. Voyez Rouge.

On ſait que l’œil étant placé au ſommet d’un cône, voit les objets ſur ſa ſurface comme s’ils étoient dans un cercle, au moins lorſque ces objets ſont aſſez éloignés de lui : car quand différens objets ſont à une diſtance aſſez conſidérable de l’œil, ils paroiſſent être à la même diſtance. Nous en avons donné la raiſon dans l’article Apparent ; d’où il s’enſuit qu’un grand nombre d’objets ainſi diſpoſés, paroîtront rangés dans un cercle ſur la ſurface du cône. Or, l’œil de notre ſpectateur eſt ici au ſommet commun de pluſieurs cônes formés par les différentes eſpèces de rayons efficaces & la ligne d’aſpect. Sur la ſurface de celui dont l’angle au ſommet eſt le plus grand, & qui contient tous les autres, ſont ces gouttes ou partie de gouttes qui paroiſſent rouges ; les gouttes de couleur de pourpre ſont ſur la ſuperficie du cône qui forme le plus petit angle à ſon ſommet ; & le bleu, le vert, &c. ſont dans les cônes intermédiaires. Il s’enſuit donc que les différentes eſpèces de gouttes doivent paroître comme ſi elles étoient diſposées dans autant de bandes ou arcs colorés comme on le voit dans l’arc-en-ciel.

M. Newton explique cela d’une manière plus ſcientifique, & donne aux angles des valeurs un peu différentes. Suppoſons, dit-il, que O, (fig. 65) ſoit l’œil du ſpectateur, & O P une ligne parallèle aux rayons du ſoleil ; & ſoient P O E, P O F des angles de 46 degrés 17 minutes, de 42 degrés 2 minutes, que l’on ſuppoſe tourner autour de leur côté commun O P : ils décriront par les extrémités E, F, de leurs autres côtés O E & O F, les bords de l’arc-en-ciel.

Car ſi E, F ſont des gouttes placées en quelque endroit que ce ſoit des ſurfaces coniques décrites par O E, O F, & qu’elles ſoient éclairées par les rayons du ſoleil S E, }{lié|S F}} ; comme l’angle S E O eſt égal à l’angle P O E qui eſt de 40 degrés 17 minutes, ce ſera le plus grand angle qui puiſſe être fait par la ligne S E & par les rayons les plus réfrangibles qui ſont rompus vers l’œil après une ſeule réflexion ; & par conſéquent toutes les gouttes qui ſe trouvent ſur la ligne O E, enverront à l’œil dans la plus grande abondance poſſible les rayons les plus réfrangibles, & par ce moyen, feront ſentir le violet le plus foncé vers la région où elles ſont placées.

De même l’angle S F O étant égal à l’angle P O B qui eſt de 42 degrés 2 minutes, ſera le plus grand angle ſelon lequel les rayons les moins réfrangibles puiſſent ſortir des gouttes après une ſeule réflexion ; & par conſéquent ces rayons ſeront envoyés à l’œil dans la plus grande quantité poſſible par les gouttes qui ſe trouvent ſur la ligne O F, & qui produiront la ſenſation du rouge le plus foncé en cet endroit.

Par la même raiſon les rayons, qui ont des degrés intermédiaire de réfrangibilité, viendront dans la plus grande abondance poſſible des gouttes placées entre E & F, & feront ſentir les couleurs intermédiaires dans l’ordre qu’exigent leurs degrés de réfrangibilité, c’est-à-dire, en avançant de E en F, ou de la partie intérieure de l’arc à l’extérieure dans cet ordre, le violet, l’indigo, le bleu, le vert, le jaune, l’orangé & le rouge : mais le violet étant mêlé avec la lumière blanche des nuées, ce mélange le ſera paroître foible, & tirant ſur le pourpre.

Comme les lignes O E, O F peuvent être ſituées indifféremment dans tout autre endroit des ſurfaces coniques dont nous avons parlé ci-deſſus, ce que l’on a dit des gouttes & des couleurs placées dans ces lignes, doit s’entendre des gouttes & des couleurs diſtribuées en tout autre endroit de ces ſurfaces  ; par conſéquent le violet ſera répandu dans tout le cercle décrit par l’extrémité E du rayon O E autour de O P ; le rouge dans tout le cercle décrit par F, & les autres couleurs dans les cercles décrits par les points qui ſont entre E & F. Voilà