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ACI
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ſuivantes, air fixé ou fixe, d’acide aérien ou crayeux, d’acide ou gaz méphitique. Cet acide très-abondant eſt ſouvent dans l’état d’un fluide aériforme. L’acide carbonique à l’état de gaz a les caractères apparens de l’air, ſavoir, l’inviſibilité par lui-même, l’élaſticité, conſéquemment la compreſſibilité, la dilatabilité, &c. mais il a des caractères particuliers qui le diſtinguent de l’air ordinaire, & dont nous parlerons au mot Gaz fixe. Il ne forme qu’un centième de l’air atmoſphérique ; mais il exiſte en grande maſſe dans pluſieurs cavités, comme la grotte du chien dans pluſieurs eaux minérales. Il ſe dégage en grande abondance des ſubſtances ſoumiſes à la fermentation ſpiritueuſe. La reſpiration, & la combuſtion des charbons en produiſent ; les végétaux à l’ombre l’exhalent, &c. Ainſi on ne ſauroît douter de ſon exiſtence ; car l’expérience montre que, dans tous les cas dont on vient de faire l’énumération, il ne jouiſſe de ſes propriétés caractériſtiques.

L’acide carbonique contracte une union avec l’alumine, la baryte & la magnéſie : il forme avec ces ſubſtances différens ſels neutres. Cet acide ſe combine rapidement avec les trois alkalis. Voyez Alkali.

Pluſieurs chymiſtes, tels que Prieſtley, Cavendish, Bergman, Schéele ont penſé que l’acide carbonique étoit formé par la combinaiſon de l’air vital avec le phlogiſtique : d’autres ont cru qu’il étoit compoſé de gaz inflammable & d’air pur ; quelques-uns, &c. Enfin M. Lavoiſier & un grand nombre de ſavans regardent l’acide carbonique comme un compoſé de carbone & d’oxigène : ſavoir, de vingt-huit parties de carbone pur, & de ſoixante-douze parties d’oxigène pour cent d’acide carbonique. « Il penſe que dans la reſpiration des animaux, il ſe dégage du ſang une véritable matière charbonneuſe, qui, ſe combinant avec l’oxigène de l’atmoſphère, forme l’acide carbonique, toujours produit dans cette fonction ; & que c’eſt également à la combinaiſon du carbone du ſucre, avec l’oxigène de l’eau, qu’eſt due la formation de l’acide carbonique qui ſe dégage dans la fermentation ſpiritueuſe. »

L’Acide muriatique,  ou acide marin, ſe retire du ſel marin. Il a une odeur vive & pénétrante qui approche de celle du citron ; ſa ſaveur, lorſqu’il eſt concentré, eſt capable de corroder nos organes. Dans ſon état de concentration il exhale des vapeurs blanches qui ſont d’autant plus abondantes, qu’il y a plus d’humidité dans l’air. Un thermomètre, mis dans cette fumée blanche, monte ; & la main placée près du goulot du flacon, qui contient cet acide, éprouve une ſenſation de chaleur.

La liqueur qu’on nomme acide muriatique, n’eſt pas l’acide muriatique pur, mais elle eſt cet acide uni avec une grande quantité d’eau. Cet acide peut être réduit en gaz permanent, au-deſſus du mercure, à la preſſion & à la température de l’atmoſphère, & alors l’acide muriatique eſt dans toute ſa pureté ; il porte alors le nom de gaz acide muriatique. On l’obtient en chauffant l’acide muriatique liquide & fumant, dans une cornue dont le bec eſt adapté à une cloche pleine de mercure & placée ſur un appareil au mercure, voyez Appareil au mercure. Ce gaz acide muriatique, dont la cloche s’eſt remplie à meſure que le mercure eſt deſcendu dans l’appareil, a une odeur pénétrante ; il eſt ſi cauſtique, qu’il enflamme la peau & y excite de très-vives démangeaiſons : il éteint la flamme des bougies, mais il l’agrandit d’abord en lui donnant une couleur verdâtre. Les corps ſpongieux l’abſorbent ; l’eau ſe combine rapidement avec lui, ainſi que la glace qui s’y fond promptement.

Le gaz acide muriatique ſe comporte dans l’air comme l’acide muriatique, c’eſt-à-dire, que l’humidité de l’air ſe combine avec lui, ce qui eſt indiqué par des vapeurs blanches, mais ſur les hautes montagnes, ainſi que l’a éprouvé M. d’Arcet dans les Pyrénées, elles ne ſont pas ſenſibles. Si on reçoit dans l’eau le gaz acide muriatique ; à meſure qu’on l’obtient, & qu’on en ſature cette eau, on aura de l’acide muriatique très-concentré & très-pur.

Il n’eſt pas de notre reſſort d’examiner les combinaiſons de l’acide muriatique, ni du gaz de ce nom, avec différentes ſubſtances ; c’eſt l’objet de la chimie. Voyez le Dictionnaire de Chimie de l’Encyclopédie, & les Elémens de Chimie des Modernes. Nous ne répéterons plus cet avis dans l’énoncé des autres acides.

L’acide muriatique oxigéné a été découvert en 1774 par Schéele, qui diſtilla alors de l’acide muriatique ſur de l’oxide de Manganèſe. Il obtint cet acide ſous la forme d’un gaz jaunâtre, d’une odeur très-piquante, d’une grande expanſibilité, & diſſolvant tous les métaux, le mercure même & l’or. Il lui donna le nom d’acide marin déphlogiſtiqué. MM. Fourcroy & Berthollet ont prouvé que dans cette diſtillation, la baſe de l’air vital contenue dans la chaux de Manganèſe, s’uniſſoit à l’acide muriatique.

L’acide muriatique oxigéné exerce ſur les parties colorantes une action ſi marquée qu’on ne ſauroit la révoquer en doute. M. Berthollet a donné pluſieurs mémoires qui ont rapport à ce ſujet : il a traité des changemens de couleurs qui ſont produits dans les oxides métalliques par l’oxigène, de ceux qui ont lieu dans pluſieurs ſubſtances animales & végétales. On ſait que l’acide muriatique oxigéné a la propriété de blanchir le lin. Voici comment M. Berthollet explique cet effet. « Lorſqu’on blanchit, dit-il, du lin ſous la forme de fil ou de toile, par le moyen de l’acide marin oxigéné, cet acide perd l’oxigène, & les parties qui lui ont enlevé ce principe, deviennent propres à ſe combiner avec les alkalis. En répétant l’action de l’acide muriatique oxigéné & celle des alkalis, toutes les parties colorantes ſont enlevées ſucceſſivement, & le lin devient blanc. Le blanchiment conſiſte donc à rendre, par le moyen de l’oxigène, les parties colorantes qui ſont fixées dans les filamens du lin, ſolubles par les alkalis de leſſives, & l’acide muriatique oxi-