Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/357

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même droit de paſſer de la phyſique dans les mathématiques, ſans qu’on s’embarraſſe d’en approfondir les cauſes qui ſont peut-être au-deſſus de notre portée ; il eſt permis de les regarder comme cauſes occultes, (car toutes les cauſes le ſont à parler exactement) & de s’en tenir aux effets qui ſont la ſeule choſe immédiatement à notre portée.

Newton a donc éloigné avec raiſon de ſa philoſophie cette discuſſion étrangère & métaphyſique ; & malgré tous les reproches qu’on a cherché à lui faire là-deſſus, il a la gloire d’avoir découvert dans la mécanique un nouveau principe qui, étant bien approfondi, doit être infiniment plus étendu que ceux de la mécanique ordinaire ; c’eſt de ce principe ſeulement que nous pouvons attendre l’explication d’un grand nombre de changemens qui arrivent dans les corps, comme productions, générations, corruptions, &c. en un mot, de toutes les opérations ſurprenantes de la chimie.

Quelques philoſophes anglois ont approfondi les principes de l’attraction. M. Keil, en particulier, a tâché de déterminer quelques-unes des lois de cette nouvelle cauſe, & d’expliquer par ce moyen pluſieurs phénomènes généraux de la nature, comme la cohéſion, la fluidité, l’élaſticité, la fermentation, la molesse, la coagulation. M. Friend, marchant ſur ſes traces, a encore fait une application plus étendue de ces mêmes principes aux phénomènes de la chimie. Aussi quelques philoſophes ont-ils été tentés de regarder cette nouvelle mécanique comme une ſcience complète, & de penſer qu’il n’y a preſque aucun effet phyſique dont la force attractive ne fourniſſe une application immédiate.

Les particules ſalines qui ſe touchoient, ſont un peu déſunies par l’effuſion de l’eau ; or, comme ces particules s’attirent l’une l’autre plus fortement qu’elles n’attirent les particules de l’eau, & qu’elles ne ſont pas également attiſées en tout ſens, elles doivent néceſſairement ſe mouvoir & fermenter.

C’eſt ainſi qu’il ſe fait une ſi violente ébullition, lorſqu’on ajoute à ce mélange de la limaille d’acier ; car les particules d’acier ſont fort élaſtiques & ſont par conſéquent réfléchies avec beaucoup de force.

On voit auſſi pourquoi certaines menſtrues agiſſent plus fortement & diſſolvent plus promptement le corps lorſque ces menſtrues ont été mêlés avec l’eau. Cela s’obſerve lorſqu’on verſe ſur le plomb ou ſur quelques autres métaux de l’huile de vitriol, de l’eau-forte, de l’eſprit de nitre rectifié ; car ces métaux ne ſe diſſoudront qu’après qu’on y aura verſé de l’eau.

XXI. Si les corpuſcules qui s’attirent mutuellement l’un l’autre, n’ont point de force élaſtique, ils ne ſeront point réfléchis ; mais ils ſe joindront en petites maſſes, d’où naîtra la coagulation.

Si la peſanteur des particules ainſi réunies ſurpaſſe la peſanteur du fluide, la précipitation s’enſuivra. Voyez Précipitation.

XXII. Si des corpuſcules nageant dans un fluide s’attirent mutuellement, & ſi la figure de ces corpuſcules eſt telle que quelques-unes de leurs parties aient plus de force attractive que les autres, & que le contact ſoit auſſi plus fort dans certaines parties que dans d’autres, ces corpuſcules s’uniront en prenant de certaines figures ; ce qui produira la criſtalliſation. Voyez Cristallisation.

Des corpuſcules qui ſont plongés dans un fluide dont les parties ont un mouvement progreſſif, égal & uniforme, s’attirent mutuellement de la même manière que ſi le fluide étoit en repos ; mais ſi toutes les parties du fluide ne ſe meuvent point également, l’attraction des corpuſcules ne ſera plus la même.

C’eſt pour cette raiſon que les ſels ne ſe criſtalliſent point, à moins que l’eau où on les met ne ſoit froide.

XXIII. Si entre deux particules de fluide ſe trouve placé un corpuſcule dont les deux côtés oppoſés ayent une grande force attractive, ce corpuſcule forcera les particules de fluide de s’unir & de ſe conglutiner avec lui ; & s’il y a pluſieurs corpuſcules de cette ſorte répandus dans le fluide, ils fixeront toutes les particules du fluide, & en feront un corps ſolide, & le fluide ſera gelé, ou changé en glace. Voyez Glace.

XXIV. Si un corps envoie hors de lui une grande quantité de corpuſcules dont l’attraction ſoit très-forte, ces corpuſcules, lorſqu’ils approcheront d’un corps fort léger, ſurmonteront par leur attraction la peſanteur de ce corps, & attireront à eux, & comme les corpuſcules ſont en plus grande abondance à de petites diſtances du corps qu’à de plus grandes, le corps léger ſera continuellement tiré vers l’endroit où l’émanation eſt la plus denſe, juſqu’à ce qu’enfin il vienne s’attacher au corps même d’où les émanations partent. Voyez Émanation.

Par-là on peut expliquer pluſieurs phénomènes de l’électricité. Voyez Électricité.

Nous avons cru devoir rapporter ici ces différens théorèmes ſur l’attraction, pour faire voir comment on a taché d’expliquer, à l’aide de ce principe pluſieurs phénomènes de chimie : nous ne prétendons point cependant garantir aucune de ces explications, & nous avouerons même que la plupart d’entr’elles ne paroiſſent point avoir cette préciſion & cette clarté qui ſont néceſſaires dans l’expoſition des cauſes des phénomènes de la nature.