Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
22
ACI

ſa première figure après la compreſſion, & reſte un peu courbé. Si on eſſaie de plier une lame d’épée, & enſuite une lame de fer des mêmes dimenſions, on verra l’expérience confirmer ce que nous venons de dire. Mais l’acier ayant plus de reſſort que le fer, eſt auſſi plus caſſant, comme la plupart des matières qui ſont douées d’une grande force de reſſort. Quelques auteurs ont dit que l’élaſticité de l’acier, plus conſidérable que celle du fer, venoit de ce que ſes molécules étoient formées de parties plus ſemblables, plus homogènes, & conſéquemment plus propres à s’unir. Cependant les mêmes ont défini l’acier, un fer très-dur & très-caſſant, qui contient beaucoup plus de matières inflammables que le fer ordinaire. Or, ces matières inflammables ne ſont cependant pas d’une nature ſemblable à celles de l’acier. Selon eux, l’acier eſt plus caſſant que le fer, parce que la liaiſon de ſes molécules eſt moindre, ſur-tout après la trempe ; mais la dureté de l’acier trempé, qui eſt prouvée par mille expériences, ne laiſſe-t-elle pas à douter de la liaiſon moins intime des parties qu’on ſuppoſe ? Ces raiſons, & pluſieurs autres qui ſe préſentent facilement à l’eſprit de ceux qui réfléchiront attentivement ſur cet objet, nous ſemblent montrer que la cauſe particulière de ces propriétés n’eſt pas encore connue, & qu’elle ne le ſera pas de long-temps, puiſque les efforts de l’illuſtre Réaumur, ſoutenus par un grand nombre d’expériences, ont été inutiles pour nous dévoiler le principe particulier de ces qualités. Mais, heureuſement pour nous, ſes expériences ſont certaines & utiles, & nous pouvons les mettre conſtamment à profit.

L’obſervation prouve encore que l’acier ſe rouille moins aiſément que le fer. Il eſt probable que la rouille n’étant qu’une décompoſition du fer, produite par l’action de l’air & de l’eau, la denſité & la dureté, qui eſt plus grande dans l’acier que dans le fer, eſt cauſe que l’acier réſiſte plus à leur action, & ſe décompoſe plus difficilement.

Quant à la peſanteur de l’acier, elle eſt un peu plus grande que celle du fer ; & elle paroît une ſuite néceſſaire de la dureté de l’acier, qui eſt plus conſidérable que celle du fer. Ainſi un cube d’acier, d’un pouce, par exemple, pèſera plus qu’un cube de fer des mêmes dimenſions. Mais cette peſanteur ne doit pas être la même, elle doit varier ſelon la nature du minerai particulier dont on l’a extrait, ſuivant les méthodes qu’on a employées pour le fondre, & ſelon les différens états où l’art l’a mis après la fuſion ; par exemple, ſelon qu’il eſt écroui ou non, ſuivant qu’il eſt trempé ou qu’il ne l’eſt pas, & de plus, ſelon les degrés d’écrouiſſement ou de trempe, leſquels peuvent être plus ou moins conſidérables. C’eſt donc à l’expérience à prononcer, & c’eſt elle qu’il faut toujours conſulter. M. Briſſon a fait pluſieurs épreuves exactes ſur ce ſujet, en employant l’acier neuf d’Angleterre ; & c’eſt par elles que nous terminerons cet article.

La peſanteur ſpécifique de l’acier qui n’eſt ni écroui, ni trempé, eſt à celle de l’eau diſtillée, comme 78 331 eſt à 10 000. Le pouce cube de cet acier pèſe 5 onces 0 gros 44 grains ; & un pied cube pèſe conſéquemment 548 livres 5 onces 0 gros 41 grains, c’eſt-à-dire 1 728 fois davantage.

Ce même acier, étant fortement écroui, ſa peſanteur ſpécifique eſt à celle de l’eau diſtillée comme 78 404 eſt à 10 000 ; ſa denſité n’a donc augmenté par l’écroui, que d’environ . Ainſi le pouce cube de cet acier écroui doit peſer 5 onces 0 gros 47 grains, & le pied cube 548 livres 13 onces 1 gros 71 grains.

Si ce même acier, fortement écroui, eſt trempé de tout ſon dur, ſa peſanteur ſpécifique eſt à celle de l’eau diſtillée, comme 78 180 eſt à 10 000, preuve que la denſité de cet acier diminue beaucoup plus par la trempe qu’elle n’augmente par l’écroui : car elle eſt diminuée par la trempe de  ; & elle n’étoit augmentée par l’écroui, que d’environ . Le pouce cube de cet acier ne pèſeroit donc que 5 onces 0 gros 39 grains ; & le pied-cube ne pèſeroit que 547 livres 4 onces 1 gros 20 grains.

Si l’on trempe ce même acier de tout ſon dur, ſans l’avoir écroui auparavant, ſa peſanteur ſpécifique eſt à celle de l’eau diſtillée comme 78 163 eſt à 10 000. D’où l’on voit que ſa peſanteur ſpécifique, & par conſéquent ſa denſité, eſt à peu près la même que celle de l’acier, qui avoit été fortement écroui avant d’être trempé, puiſque ſa denſité a été diminuée de ſon état primitif d’environ , & que celle de l’acier qui avoit été écroui avant la trempe, eſt diminuée auſſi de ſon état primitif d’environ  ; ce qui prouve que l’action du fer, avant de le tremper, a ôté à l’acier écroui à peu près l’augmentation de denſité qu’il avoit acquiſe par l’écroui. Le pouce cube de cet acier ne pèſeroit que 5 onces 0 gros 38 grains, & le pied cube ne pèſeroit que 547 livres 2 onces 2 gros 3 grains.

De ces réſultats, on doit conclure, 1o. que l’acier, par la trempe, augmente toujours de volume ; & par conſéquent diminue de denſité ; 2o. que l’acier a, dans tous les cas, une peſanteur ſpécifique, plus grande que celle du fer. Voyez l’article Pesanteur spécifique, & le mot Trempe.

L’acier ſe couvre de rouille dans le mercure pour peu qu’il y ſéjourne, ainſi que M. de Luc l’a éprouvé dans quelques petits appareils qu’il avoit fait conſtruire pour contenir le mercure dans le baromètre.

Il n’eſt pas de notre objet de parler des nouvelles expériences de Mrs . Vandermonde, Monge & Berthollet ſur l’aciération, dont les réſultats conduiſent à cette concluſion, que la fonte eſt une combinaiſon de fer, d’oxigène & de carbonne ; l’acier, une combinaiſon de fer & de carbonne ;