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AUR

tantôt rompue & tantôt en ſon entier. Ce qu’on nomme bothynoë ou antre, n’eſt autre choſe qu’un aire qui paroît creuſé en-dedans, comme une profonde caverne, & qui eſt entouré comme d’une couronne. On appelle pythie ou tonneau, la lumière qui ſe manifeſte ſous la forme d’un gros tonneau rond qui paroît brûlant. Il eſt aiſé de s’appercevoir que tous ces noms-là ſont de peu d’importance, qu’on en peut inventer ſuivant les différentes formes que prend la lumière, ſans être plus habile pour cela. Il faut cependant convenir que quelquefois les noms de poutre, de flèche, torche, de chèvre danſante, ont été employés non-ſeulement pour déſigner des portions d’aurores boréales ou des aurores boréales incomplettes, mais encore quelques-uns de ces météores vagues, de ces feux volans qu’on apperçoit dans l’atmoſphère.

On évitera cet abus, ſi on ſe forme d’abord une idée de l’aurore boréale la plus brillante & la plus complette, & qu’on ne conſidère ce qu’on a nommé différentes eſpèces d’aurores boréales que comme des aurores auxquelles manquent pluſieurs parties de ce phénomène.

Les aurores boréales ſeront donc complettes ou incomplettes ſelon qu’on y appercevra toutes les parties ou ſeulement quelques-unes des parties qui compoſent celles qui ſont parfaites. Les aurores incomplettes comprendront l’arc lumineux, le ſegment obſcur, les jets lumineux, les colonnes de lumière, le mouvement ondoyant de la matière lumineuſe, les taches rouges, la couronne, & objets dont nous avons parlé dans la deſcription de différentes aurores boréales obſervées en divers lieux. Les aurores incomplettes, ſeront plus ou moins imparfaites, ſelon qu’une ou pluſieurs des portions qu’on vient de déſigner ſeront ſupprimées, ſoit par le défaut d’abondance dans la matière électrique qui les produit, ſoit par l’influence de pluſieurs cauſes deſtructives ou perturbatrices.

Il y aura donc des aurores boréales tranquilles ſans ſegment, comme celle de la figure 144 ; les aurores à un arc lumineux, avec ſegment figure 142 ; à deux arcs lumineux, figure 139 ; des aurores à crénaux, figure 140, avec ſegment obſcur ; des aurores ſans arc, ni ſegment viſibles, mais cachés par différentes cauſes, & avec des colonnes lumineuſes comme dans la figure 145 ; des aurores à jets ou rayons de lumière, avec ou ſans arc lumineux, figures 141 & 143 ; des aurores à couronne, ou pavillon, &c, figures 147 & 148. Tous ces objets ſeront encore mieux compris par les deſcriptions ſuivantes, qui ſont ſuffiſamment détaillées.

La figure 139 repréſente l’aurore boréale, vue à Greſſen le 17 février 1721 d’après la figure qui en fut donnée dans les actes de Leipſick, dépouillée des rayons & de jets de lumière. Α, B, C, D déſignent le ſegment obſcur circulaire ou elliptique.

Les lettres E, F, G, C, B, Α montrent le premier arc lumineux. H, I, K, L font voir le ſecond arc lumineux, qui paroît quelquefois, & qui eſt toujours coneentrique au premier arc & au ſegment. L, M, eſt la voie lactée. On a vu auſſi un troiſième arc lumineux, un quatrième même, Burman en a apperçu quatre dont trois étoient bien diſtincts ; ils étoient les uns ſur les autres & ſéparés par des intervalles circulaires obſcurs, c’étoient des anneaux lumineux alternativement mêlés à des anneaux coneentriques obſcurs. Cette obſervation eſt du 20 ſeptembre 1717, & a été faite à Upſal. Les tranſactions philoſophiques en parlent. Il y a même quelques obſervations d’aurores boréales à ſix ou ſept arcs.

On voit dans la figure 140 une aurore boréale à bande crenelée ; M. de Mairan l’obſerva à Breuillepont près de Paris, le 19 octobre 1726.

La figure 141 montre une aurore boréale dans laquelle on voit des brèches dans le ſegment, & des briſures dans l’arc lumineux avec des jets de lumière, &c. Elle fut obſervée par le même phyſicien & au même endroit, le 26 ſeptembre 1731, à 9 heures.

L’aurore qui eſt repréſentée dans la figure 142, fut ainſi vue à Montpellier par M. de Plantade, de l’académie des ſciences de cette ville. Elle eſt ſingulière par les accidens de lumière, par les couleurs qu’on y remarqua, & par l’eſpèce de nuages ſinguliers dont ce phénomène fut accompagné ; le ſegment obſcur, au lieu d’être d’un gris d’ardoiſe ou d’un violet brun, comme il eſt ordinairement, étoit d’un bleu foncé. Le limbe, couleur de feu auprès du ſegment ſe terminoit inſenſiblement en jaune. Le rouge dominoit dans la gerbe de rayons qu’on voyoit à gauche vers l’oecident ; ce qu’on prendroit pour un gros nuage du même côté & qui y cache une partie du limbe, tire ſur la couleur de ſang ; les nuages noirâtres de la droite ſont plus foncés, & ſur-tout mieux tranchés que ne le comporte la contexture ordinaire des vrais nuages. Tout le reſte du ciel étoit d’un gris cendré, peu uniforme, fouetté de violet, & qui s’éclairciſſoit de plus en plus en approchant du limbe, juſqu’à devenir d’un blanc citrin. Ce limbe eſt plus large qu’il n’a coutume d’être, car il fait plus du tiers de toute la hauteur du phénomène, à compter de l’horiſon juſqu’au ſommet de l’arc. Cette aurore fut obſervée le 16 décembre 1726.

La figure 143 fait voir une aurore boréale à jets de lumière ſans ſegment obſcur : on l’apperçut ainſi à Breuillepont le 26 septembre 1726.

La figure 144 montre une aurore boréale que j’appellerois volontiers aurore boréale à ſegment circulaire lumineux ; il eſt évident que l’arc lumineux eſt ici entièrement confondu avec le ſegment devenu lumineux ; j’obſervai cette eſpèce d’aurore boréale à Béziers, le 30 janvier 1781. Pendant un