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propre à faire deſcendre & monter les machines aéroſtatiques, ſans jeter de leſt, & ſans perdre d’air inflammable.

De quelque manière qu’un ballon ſoit conſtruit, quelque ſoit ſa forme, pourvu qu’il contienne deux capacités diſtinctes, dont l’une ſoit deſtinée à renfermer une quantité de gaz inflammable, toujours conſtante, & l’autre un volume variable d’air atmoſphérique, il ſera propre à tous les changemens de hauteur qu’il s’agiſſoit d’obtenir ; il faut ſeulement que la ſomme des deux capacités faſſe toujours un volume conſtant, & que les deux airs y ſoient ſoumis à une compreſſion un peu plus forte que celle de l’air environnant. Il ſuffit alors pour que la machine monte, d’ouvrir une iſſue à l’air atmoſphérique intérieur, par le moyen d’un ſimple robinet ; la preſſion que cet air éprouve en détermine la ſortie, le poids de la machine diminue, elle s’élève, & cette aſcenſion dure autant que l’écoulement de l’air intérieur. Ainſi, dès que le robinet par lequel il s’échappoit ſera fermé de nouveau, le ballon ſe fixera, & la denſité de l’air environnant ſera diminuée alors dans la proportion de la perte du poids que la machine aura faite.

On voit aiſément que, pendant cette aſcenſion, le reſſort de l’air inflammable fait augmenter la capacité qui le renferme aux dépens de celle d’où l’air atmoſphérique s’échappe, & qu’ainſi le terme de la hauteur que peut acquérir l’aéroſtat arrivera lorſque l’eſpace deſtinée à l’air atmoſphérique étant réduit à rien, celui du gaz inflammable occupera la capacité entière du ballon. On voit de même que, pour déterminer la deſcente, il ſuffit d’introduire de l’air commun dans l’eſpace dont il s’agit, avec le ſoufflet le plus ſimple ; de petites quantités d’air introduites ou évacuées, ſuffiront donc pour occaſionner des changemens notables dans la poſition du mobile.

Mais quelle doit être la diſpoſition de ces deux capacités deſtinées à loger deux airs différens ? On peut ſéparer l’une de l’autre ces deux capacités par une ſorte de diaphragme flexible, ſemblable pour la forme à une des moitiés de l’enveloppe du ballon ; l’air inflammable occuperoit le deſſus ; lorſque l’air atmoſphérique ſeroit entièrement évacué, ce diaphragme ſeroit exactement appliqué contre l’hémiſphère intérieur ; on pourroit encore loger l’air atmoſphérique dans une eſpace renfermé lui-même tout entier dans un ballon qui contient le gaz inflammable, en employant pour cela un autre ballon moindre que le premier ; l’air atmoſphérique rempliroit totalement ce ballon intérieur, lorſque la machine ſeroit encore au point le plus bas de ſa courſe ; mais au point le plus haut, cet air étant totalement évacué, ſon enveloppe ſeroit tout à fait déprimée, & l’air inflammable occuperait l’eſpace entier du ballon extérieur ; la capacité du ballon intérieur ne doit donc pas être plus grande que ce dont le gaz inflammable devroit se dilater, par la plus haute aſcenſion dont on voudroit rendre la machine ſuſceptible ; d’où il ſuit que cette méthode ſeroit la plus économique du côté de la quantité d’étoffe à employer, & du poids qui en réſulte. Mais dans l’une & l’autre de ces diſpoſitions, la compreſſion intérieure devient une cauſe de plus pour la déperdition du gaz inflammable, déjà ſi difficile à contenir, & le ſuccès de l’appareil dont il s’agit ici, dépend au contraire de la conſervation la plus exacte de ce fluide léger.

Il ſeroit donc préférable de renfermer le ballon à gaz inflammable dans un autre, & de loger l’air atmoſphérique dans l’intervalle des deux enveloppes ; alors le gaz inflammable ſeroit environné de toutes parts. Cette méthode exige l’emploi d’une quantité d’étoffe plus grande que les deux premières dont on vient de parler.

MM. Robert ſont les premiers qui aient exécuté un ballon à double capacité, dont l’une propre à contenir le gaz inflammable, l’autre l’air atmoſphérique : c’eſt celui qui fut conſtruit à Saint-Cloud. Ce ballon étoit un ſolide formé d’une portion cylindrique de vingt pieds de longueur, entre deux demi-ſphères de trente pieds de diamètre, ainſi que le cylindre ; la capacité de ce ballon étoit, par conſéquent, double de celle d’une ſphère de trente pieds, c’eſt-à-dire, de 28 174 pieds cubes ; le poids d’un pareil volume d’air atmoſphérique, pris à la ſurface de la terre, devoit être conſéquemment d’environ 2 457 livres, à de légères variétés près, dépendantes de la température & de l’état du baromètre.

Dans ce ballon, la capacité qui contenoit l’air atmoſphérique étoit renfermée toute entière dans le gaz inflammable ; elle conſiſtoit dans un ballon ſphérique de 19 pieds de diamètre, placé au milieu de la longueur du ballon principal ; la capacité de cette ſphère de 19 pieds étoit de 3 591 pieds cubes, & contenoit un poids de 312 livres d’air atmoſphérique.

Le ballon intérieur portoit une appendice ou tuyau flexible, auquel on adaptoit un ſoufflet placé dans la galerie ſuſpendue à la machine ; l’air atmoſphérique introduit à volonté dans le ballon intérieur, à l’aide de ce ſoufflet, y produit des augmentations ſucceſſives de poids dont l’effet eſt de faire deſcendre l’aéroſtat, pour ainſi dire, pas à pas, à chaque coup de ſoufflet que donnent les navigateurs ; quand ils permettent au contraire à ce même air atmoſphérique de s’échapper par une iſſue ſuſceptible d’être ouverte ou fermée à volonté, le ballon doit remonter par la diminution de ſon poids ; & la durée de ces différens mouvemens étant déterminée par celle des manœuvres qu’on vient