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nuage qui ne paroît pas en été. De-là vient encore que le brouillard règne pluſieurs jours de ſuite dans les pays froids du Nord.

Le brouillard ſe manifeſte, ſoit que le baromètre ſe trouve haut ou bas. Le brouillard étant une eſpèce de pluie, n’a rien d’étonnant, quand le mercure eſt bas : mais lorſqu’il ſe tient haut, on aura du brouillard ; 1o. ſi le temps a été long-temps calme, & qu’il ſe ſoit élevé beaucoup de vapeurs & d’exhalaiſons qui aient rempli l’air & l’ayent rendu ſombre & épais ; 2o. ſi l’air ſe trouvant tranquille, laiſſe tomber les exhalaiſons, qui paſſent alors librement à travers.

Le brouillard tombe indifféremment ſur toute ſorte de corps, & pénètre ſouvent dans l’intérieur des maiſons lorſqu’il eſt fort humide. Il s’attache alors au mur & s’écoule en bas, en laiſſant ſur les parois de longues traces qu’il a formées.

L’opacité du brouillard eſt cauſée, ſelon quelques auteurs, par l’irrégularité des pores que forment les vapeurs avec l’air. Cette irrégularité dépend de la grandeur de ces pores, de leur figure, & de leur diſpoſition. Cela peut venir auſſi de la différence de la denſité qu’il y a entre les exhalaiſons de l’air ; car, lorſque la lumière du ſoleil fait effort pour pénétrer à travers l’air, elle eſt continuellement forcée de ſe détourner de ſon droit chemin, & de changer de route. C’eſt pour cela qu’il arrive ſouvent que l’air, quoique fort peu chargé de vapeurs, paroît être fort nébuleux & fort ſombre ; au lieu qu’il devient tranſparent & plus clair, lorſqu’il ſe remplit d’une plus grande quantité de vapeurs, qui ſe diſtribuent d’une manière plus uniforme par-toute l’atmoſphère.

Le brouillard eſt quelquefois fort délié, & diſperſé dans une grande étendue de l’atmoſphère ; de ſorte qu’il peut recevoir un peu de lumière ; on peut alors enviſager le ſoleil à nu ſans en être incommodé. Cet aſtre paroît pâle, & le reſte de l’atmoſphère eſt bleu & ſerein. Le 1er juin 1721, on obſerva à Paris, en Auvergne, & à Milan, un brouillard qui paroît avoir été le même dans tous ces endroits, & qui doit avoir occupé un eſpace conſidérable dans l’atmoſphère.

On demande, 1o. pourquoi il fait beau en été lorſque l’air ſe trouve chargé de brouillards le matin. Cela vient apparemment de ce que le brouillard ſe trouvant mince & délié, eſt repouſſé vers la terre par les rayons du ſoleil ; de ſorte que ces parties devenues fort menues, & étant ſéparées les unes des autres, vont flotter ça & là dans la partie inférieure de l’atmoſphère, & ne ſe relèvent plus.

2o. Pourquoi il ſe forme tout à coup de gros brouillards à côté & ſur le ſommet des montagnes. On ne ſauroit en imaginer de cauſe plus vraiſemblable que les vents, qui venant à rencontrer des vapeurs & des exhalaiſons déliées & diſperſées dans l’air, les emportent avec eux, & les pouſſent contre les montagnes, où ils les condensent. Lorſque l’on ſe tient dans une vallée, d’où l’on conſidère de côté une montagne, à l’endroit où le ſoleil darde ſes rayons, on en voit ſortir une épaiſſe vapeur, qui paroît s’élever comme la fumée d’une cheminée mais lorſqu’on regarde de front l’endroit éclairé de cette montagne, on ne voit plus cette vapeur. Cela vient de la direction des rayons de lumière. Lorſque dans une chambre obſcure on laiſſe entrer les rayons du ſoleil par une petite ouverture, on voit, en regardant de côté, de petits filets & une pouſſière fort fine dans un mouvement continuel ; mais lorſque les rayons viennent frapper directement la vue, ou qu’ils tombent moins obliquement dans l’œil, on n’aperçoit plus ces filets flottans. C’eſt le cas des vapeurs qui s’élèvent de la montagne, que l’on enviſage de côté ; car on voit alors les vapeurs qu’elle exhale, au lieu qu’elles diſparoiſſent, quoiqu’elles montent toujours également lorſqu’on regarde la montagne de front.

Les brouillards ne ſont que de petits nuages, placés dans la plus baſſe région de l’air ; & les nuages que des brouillards qui ſe ſont élevés plus haut. Voyez Nuage.

Les objets que l’on voit à travers le brouillard paroiſſent plus grands & plus éloignés qu’à travers l’air ordinaire. Voyez Vision.

L’on choisit pour pêcher les harengs un temps rempli de brouillards ].

De ce qu’on a vu juſqu’à préſent, on doit conclure qu’il y a deux ſortes de brouillards, ainſi que je l’ai déjà indiqué au commencement de cet article ; ſavoir, des brouillards aſcendans & des brouillards deſcendans. Les premiers ſont formés par les vapeurs qui s’élèvent des fleuves, des rivières, des marais, des étangs, des mers, & de la terre même, ſur-tout lorqu’elle eſt humectée par des pluies, des neiges, de la rosée, du ſerein, &c. Les ſeconds, les brouillards deſcendans, reſultent des vapeurs répandues dans l’atmoſphère, qui, par des alternatives de chaud & de froid, conſéquemment de raréfaction & de condenſation, par l’impulſion des vents ou par d’autres cauſes de ce genre, tombent ſur la terre après s’être réunies pluſieurs enſemble, de ſorte qu’elles forment alors des vapeurs plus peſantes ſpécifiquement qu’un égal volume d’air de la couche où elles étoient d’abord.

En effet, ſi l’air de chaud devient froid, ou de froid plus froid encore, ſes molécules ſe rapprochent, une portion quelconque de ſa maſſe devient