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& être surmontées de tables tranchantes f, ornées de guirlandes; enfin, les portes composites peuvent être ornées de chambranle a, d’amortissement b, & d’un fronton c, ainsi que se remarque celle du rez-de-chaussée de l’intérieur de la cour du Louvre; autant de membres d’Architecture & d’ornemens qui peuvent se varier à l’infini, mais dont l’application, le relief & l’expression doivent se puiser dans les ordres, dans les entre-colonnemens desquels ces ouvertures sont ordinairement placées.

PLANCHE XI.
Des croisées.

Les croisées doivent avoir les mêmes proportions que les portes, parce que toutes les ouvertures dans un bâtiment doivent avoir les mêmes rapports: les ornemens sont à-peu-près dans le même cas, mais leur forme doit différer, les ceintres surbaissés & les pleins ceintres ne convenant qu’aux ouvertures des portes; & les arcs bombés & les plates bandes semblant devoir être consacrés seulement aux ouvertures des croisées. Certainement chaque membre dans l’Architecture porte un caractere établi par l’usage, dont on ne doit s’écarter que par de bonnes raisons: cependant cette considération a paru arbitraire à la multitude; d’où il est résulté qu’au lieu de faire de belles portes & de belles croisées dans nos bâtimens françois, on n’a plus songé qu’à faire des percemens dans les murs de face, sans égard à la beauté des formes, à la conformité de l’ordonnance, & à la relation que les vuides doivent avoir avec les pleins, dans la décoration de nos édifices. C’est en pure perte, pour le grand nombre, qu’on remarque au Louvre, au Luxembourg, à la Sorbonne, des desseins en ce genre d’un goût exquis; on imite ceux des Tuileries, du Palais Royal & tant d’autres fort au-dessous de ceux que nous citons, sans songer que les croisées se répétant à l’infini dans un bâtiment, c’est vouloir multiplier la médiocrité, que de négliger l’étude de cette partie intéressante de la décoration.

La croisée rustique de cette Planche est à appui plein; la toscane offre un balcon de fer placé ici pour faire sentir l’abus de ce genre frivole, auquel on devroit toujours substituer une balustrade, comme à la croisée dorique, surtout lorsque l’on est forcé de faire descendre le bas de l’ouverture jusques dessus le sol des appartemens. La croisée ïonique est couronnée d’une mézanine, non que cette deuxieme ouverture soit toujours nécessaire, mais pour en présenter un exemple. Les croisées corinthiennes & composites sont à l’imitation de celles du Louvre, & offrent autant de modeles qui peuvent servir d’autorité, mais qui, comme les portes, peuvent se varier à l’infini, selon l’application qu’on en veut faire dans l’Architecture.

PLANCHE XII.

{{Centré|Des niches & des frontons.

Les niches dans l’Architecture tiennent de la proportion des portes & des croisées. Ce sont des cavités prises dans l’épaisseur des murs, destinées à recevoir des statues. Il s’en fait de deux especes; les unes quarrées par leur plan, & en plate-bande dans leur sommet, comme on le voit à la niche rustique; les autres, dont le plan est décrit par un demi-cercle, & dont le sommet plein ceintre forme un cul de four, ainsi que le présentent les autres niches de cette Planche.

Il faut observer que, soit que le diametre des niches soit grand, petit ou moyen dans une même ordonnance de bâtiment, il faut que toutes puissent contenir une figure de même grandeur, c’est-à-dire égale au tiers de la hauteur de l’ordre qui préside dans la décoration de l’édifice; de maniere que, dans le cas où ce rapport ne pourroit avoir lieu, il faudroit éviter l’application des niches. Disons un mot du moyen de faire servir les statues d’une hauteur égale dans des niches de différente grandeur. Par exemple, dans les petites niches on se contentera de poser sous les piés de la statue un socle, comme il s’en remarque dans les niches dorique, ïonique & corinthienne; dans les moyennes niches, au lieu de socle, on placera un piédouche, comme dans les ni-

ches toscane & rustique. Enfin dans les grandes niches, non-seulement on groupera les figures, mais on placera un piédestal, comme dans la niche composite; de maniere que par les différentes hauteurs des piédestaux, des piédouches ou des socles, les statues d’une hauteur égale pourront être placées dans des niches de diverses grandeurs.

En général il ne faut pas abuser de l’emploi des niches dans l’Architecture; il devroit être réservé pour les édifices sacrés, les fontaines, les châteaux d’eaux, & autres édifices hydrauliques. Dans les maisons des particuliers elles attaquent la solidité des murs, & ne préseutent à l’œil que des figures plus petites que nature, qui rendent l’ordonnance de la décoration chétive & mesquine; ce qui ne peut arriver dans les monumens publics, à cause de leur grandeur, toujours fort au-dessus de celle des bâtimens d’habitation.

Au bas de cette Planche on remarque plusieurs desseins de frontons. La figure A donne la maniere de tracer leur hauteur par leur base, c’est-à-dire que la perpendiculaire a du triangle isocele a, c, d, qui les compose, soit à la base c, d de ce triangle. comme cinq est à vingt-quatre; ce qui est la même chose que le procédé de décrire le quart de cercle d, e, pour du point e, comme centre, tracer la portion d, a; portion qui détermineroit la courbure du fronton circulaire, de même hauteur que le fronton triangulaire.

En général les frontons circulaires ont plus de pesanteur réelle, & présentent une forme plus matérielle à l’œil que les triangulaires; aussi doit-on ne les employer que dans les ordonnances rustique & toscane, malgré la multitude d’exemples contraires.

La figure B présente la forme d’un fronton la plus réguliere, c’est-à-dire un entablement continu & une corniche angulaire; à l’égard des ornemens de sculpture, le mieux seroit de n’en jamais mettre dessus les frontons, parce que c’est employer deux amortissemens pyramidaux l’un sur l’autre; mais particulierement on devroit toujours éviter les figures a posées sur les corniches inclinées; le socle horisontal b semblant autoriser celle c, ainsi qu’on le remarque avec succès au château de Seaux, du côté de l’entrée. Au contraire, le tympan d devroit toujours être destiné à recevoir quelques bas reliefs, & c’est à quoi se devroit réduire toute la richesse de ces couronnemens, qui néanmoins, comme les niches, devroient être consacrés pour la décoration de nos temples, ou n’être employés que sur les avant-corps principaux des palais des Rois & des édifices publics, & jamais dans la décoration des bâtimens particuliers.

La figure C offre la coupe ou profil du fronton B.

La figure D fait voir la partie angulaire de l’extrémité du fronton, tel qu’on l’exécute dans l’Architecture réguliere, de préférence à la crossette que présente la figure E, qui, de même que celles F, G, ne sont placées ici que comme des exemples à éviter, ainsi qu’une infinité d’autres frontons enroullés, découpés, chantournés; productions gothiques qui ne sont imitées de nos jours, que par les architectes subalternes, & que les grands maîtres sçavent rejetter.

SECONDE PARTIE.

Observations générales sur les trois ordres grecs appliqués en particulier à plusieurs monumens érigés pour la magnificence.

La connoissance des ordres que nous venons d’acquérir seroit insuffisante, si nous ne cherchions pas à connoître l’application que nous en devons faire dans la décoration des bâtimens. Nous avons déjà dit qu’il en étoit de cinq especes, trois grecs & deux romains. Les trois Planches suivantes vont nous offrir l’application des trois premiers dans la fontaine de Grenelle faubourg S. Germain, d’ordre ïonique; dans le projet d’une autre fontaine, d’ordre dorique; & dans la colonade du Louvre, d’ordre corinthien. A l’égard des deux derniers, toscan & composite, production des Romains, nous n’avons point donné d’exemple de leur application dans