Page:Encyclopedie Planches volume 5.djvu/370

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parois verticales & de celui en banquettes, les dépenses qui augmentent à proportion des forces redoublées qu’il faut employer pour l’enlevement des eaux & des matieres, passent pour des obstacles insurmontables pour descendre à une plus grande profondeur; l’expérience nous apprend néanmoins que plus ces carrieres sont profondes, plus l’ardoise est abondante, & plus elle augmente de qualité & de beauté.

D’après ce principe fondé sur l’expérience, il est aisé de conclure qu’on ne peut apporter trop de soins, de travail & d’intelligence à la perfection des manœuvres qu’exige l’extraction d’une matiere si belle & si nécessaire.

Je pose pour principes que l’exploitation ordinaire des carrieres d’ardoise est susceptible dans sa forme & son état actuel de plusieurs avantages qu’il est de l’intérêt public de ne pas négliger, & qu’en s’écartant de l’usage ordinaire, on peut se flatter de les rendre plus belles, plus sures & plus avantageuses.

Quoiqu’il soit démontré par l’expérience que plus on approfondit une carriere, & plus la matiere qu’elle produit est abondante & belle; supposons un instant qu’on regarde la profondeur de 30 foncées comme le nec plus ultra, on doit au-moins en ce cas s’occuper des moyens d’y parvenir avec le plus d’avantage possible. Il est donc essentiel de déterminer avec intelligence les premieres opérations & les premieres fouilles d’une carriere qui décident pour l’ordinaire de sa réussite. Le cube à enlever étant un prisme quadrangulaire dont deux côtés sont censés paralleles, & les deux autres ont la même inclinaison, on en doit aisément connoître la base supérieure, puisque l’axe & les angles sont connus.

Car si l’on considere la coupe de la carriere du côté du couchant ou du principal chef, on remarquera que les parois du midi & du nord étant taillées suivant un même angle d’inclinaison en sens contraire, ils doivent se réunir ou se couper à une profondeur qui sera déterminée par leur inclinaison commune & la largeur de la base supérieure. Ils forment alors un triangle isocele, dont les angles sur la base qui est l’ouverture du haut de la carriere, sont chacun de 70 degrés, & dont la pointe ou le sommet est à la section des plans des parois du nord & du midi qui en font les côtés. L’exploitation ordinaire des carrieres exigeant de ne point réunir les sections des parois du nord & du midi, & de réserver une partie rectangulaire à la profondeur des 30 foncées, où l’on a pour but de descendre, il est évident que l’axe du prisme quadrangulaire supérieur sera exprimé par 270 piés hauteur des foncées, & que si l’on suppose que de part & d’autre de cet axe il reste dans le bas vingt piés de largeur jusqu’au pié des parois du nord & du midi, on parviendra facilement à connoître la ligne horizontale du haut de la carriere qui exprime la moitié de son ouverture depuis l’axe jusqu’au sommet de la couche; car en supposant que l’on prolonge les deux parois du nord & du midi jusqu’à leur section, l’angle que formeront ces deux plans au sommet du triangle, sera de 40 degrés, puisque les deux de la base sont chacun de 70, ce qui fera 20 degrés pour la moitié de l’angle de la pointe du prisme triangulaire & idéal qui restera en terre sous le quadrangulaire. Or ce prisme triangulaire étant coupé en deux parties par l’axe, chacun des triangles sera facilement connu, tant pour les angles que pour les côtés; car l’angle du sommet est de 20 degrés, celui joignant l’axe de 90, le troisieme sera donc de 70 degrés, & puisque la base de ce triangle est de 20 piés, ainsi qu’on l’a déterminé ci-dessus par un simple calcul des sinus, on aura la hauteur de l’axe du prisme triangulaire inférieur, & conséquemment celle du prisme total triangulaire réunissant les deux autres; d’où l’on voit que par une proportion très-simple des triangles semblables, on connoîtra la base du grand triangle supérieur qui est l’ouverture totale de la carriere.

Il résulte de ce qui vient d’être dit, que l’axe du prisme quadrangulaire qui exprime la profondeur où l’on veut descendre étant de 270 piés, l’axe du pent prisme triangulaire inférieur sera de 54 piés, la hauteur totale des axes réunis de 324 piés, & la base du triangle ou la largeur de l’ouverture de la carriere de 242 piés, ce qui fait connoître que cette ouverture doit être à la profondent à laquelle on se propose de descendre, comme 24 est à 27; mais si l’on fait attention que tous les accidens qu’on éprouve d’ordinaire dans ces sortes de travaux proviennent presque toujours de l’écroulement de la paroi du nord, où toutes les couches sont coupées dans leur plus grand désavantage par leur inclinaison naturelle, on sentira la nécessité, en laissant subsister le talut de la paroi du midi, qui doit être invariable, puisqu’elle suit l’inclinaison des couches elles-mêmes, de donner plus de talut à celui du nord, pour rendre par ce moyen la charge supérieure des banquettes beaucoup moins considérable. L’expérience même confirme que les déblais deviennent toujours nécessaires dans cette partie pendant le travail, mais que souvent par des manœuvres précédentes & non raisonnées, on se trouve dans l’impossibilité de les faire avec succès.

Il est donc question de déterminer quel est l’angle qu’il conviendroit de donner à cette paroi du nord, pour lui assurer l’inclinaison la plus avantageuse; il n’est pas douteux que la désunion constante des couches par les matieres étrangeres qui les pénetrent & les fils acci-dentels qui les divisent en tout sens, doivent les faire regarder comme tendantes continuellement à s’écrouler, & que par cette raison l’angle le plus avantageux qu’on pourroit fixer à la paroi du nord, seroit celui des grands taluts des terres rapportées, qu’on sait être de 55 degrés; ce seroit sans contredit se mettre au-dessus des accidens, mais augmenter considérablement la dépense sans une nécessité absolue, au-lieu qu’en se fixant à 45 degrés, talut ordinaire des terres moins coulantes, les opérations pratiquées deviennent plus aisées, & l’inquiétude des accidens doit cesser également. On peut donc conclure avec certitude de ce qui vient d’être dit, que toutes les fois qu’il sera question de former une carriere d’ardoise, la largeur de l’ouverture sur le principal chef doit être à sa profondeur, telle qu’elle soit, dans le rapport de 41 à 27, c’est-à-dire, pour plus grande facilité dans la pratique, que le point de l’axe sera aux deux tiers de la largeur de la base de la carriere, dont deux tiers jusqu’au sommet du talut de la paroi du nord, & un tiers jusqu’à celui de la paroi du midi, en se reculant, s’il est besoin, jusqu’à l’inclinaison favorable de quelque couche; je joins pour plus grande intelligence un exemple au précepte.

Si l’on veut descendre à 300 piés de profondeur on dira: Si 270 piés de profondeur d’une carriere exigent pour la largeur de son ouverture 411 piés, combien 300 piés de profondeur exigeront-ils? Le résultat sera de 455 piés, dont 185 pour la distance de l’axe aux parois du midi, & 270 à celui du nord.

On doit d’autant plus sentir la nécessité d’agir en pareil cas avec intelligence & connoissance de cause, que nous avons vû des entreprises considérables en ce genre, échouer par la seule cause d’une opération mal entamée, souvent attribuée sans raison à la mauvaise qualité de la matiere, par le transport non raisonné des vuidanges dans des endroits peu convenables, par l’impossibilité de travailler dans des anciennes fouilles, par la fausse certitude d’une ancienne extraction qui n’a point eu lieu, par l’encombrement d’un terrein précieux & non fouillé, & enfin par des dépenses inutiles & multipliées, par le peu de savoir & d’expérience des personnes commises à des travaux de cette importance.

Ce n’est pas tout, l’ouverture d’une carriere ne devroit point être une chose arbitraire, la province devroit posséder un détail exact de ses richesses en ce genre, une carte Minéralogique & bien détaillée du cours de ces carrieres devroit indiquer ces mêmes richesses; les fouilles anciennes y seroient exactement constatées, le terrein vierge connu, & toute carriere à ouvrir approuvée & limitée en connoissance de cause, on éviteroit l’inconvénient de voir des compagnies se hasarder à l’entreprise d’une carriere, & ne s’y livrer qu’imparfaitement, par la crainte continuelle d’un travail infructueux, obstacle essentiel aux progrès de l’industrie & aux efforts des artistes; on assureroit la conservation d’une matiere précieuse, l’émulation redoubleroit d’ac-