Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/182

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Bélinsky, tué, à trente-cinq ans, par la faim et la misère.
Poléjaëff, mort dans un hôpital militaire, après avoir été forcé de servir comme soldat, au Caucase, pendant huit années.
Baratinsky, mort après un exil de douze ans.
Bestujeff, succombé au Caucase, tout jeune encore, après les travaux forcés en Sibérie ! »

Dans toutes les législations russes, dans celle de Pierre-le-Grand comme dans celle d’Alexandre, comme dans celle de Nicolas, tout présente un caractère de transition, d’incertitude, comme si ce peuple, campé au milieu des glaces et des steppes, sentait qu’il ne doit songer à rien fonder de stable et qu’il a déjà bien assez de peine à vivre au jour le jour, en dehors de la terre qui lui est promise.

Le Code russe, c’est bien, en effet, le règlement disciplinaire d’un camp : il convient admirablement à ces hommes aventureux qui passent leur vie au grand soleil, aux belles étoiles, et qui chantent : « Je ne veux plus travailler dans les champs ; qu’ai-je gagné en labourant la terre ? Je suis pauvre et méprisé. Je prendrai pour compagnons la nuit sombre, le couteau effilé ; je trouverai des amis dans les bois touffus ; je tuerai le seigneur et je pillerai le marchand sur la grand route. Au moins, tout le monde me respectera, et le jeune voyageur passant sur mon chemin, et le vieillard assis devant la porte de sa maison me salueront. »

Et ce qu’il y a de plus extraordinaire dans le génie de ces peuples, c’est qu’à ces mœurs nomades, à ce caractère non fixé dans le présent, ils joignent de grandioses rêves d’ambition, une insatiable soif d’accroissement et d’organisation future.


IV.   On dit que cette race n’aime pas la liberté, qu’elle