Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/294

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par les mêmes désastres, les peuples remontent à leurs causes premières et ne les attirent plus sur eux en transgressant les lois de la nature ; pour que les hommes comprennent et subissent l’universelle Transformation.

Des hommes incultes qui, la veille encore, ne soupçonnaient pas leur commune existence, le paysan, lourd piéton de la Beauce, et le maigre Cosaque, cavalier ailé des rives du Don, se trouvent rapprochés, comme par enchantement, des deux extrémités d’un monde. Il faut qu’ils se connaissent, se comprennent, et de bon ou de mauvais gré, s’associent. Les chiens qui se rencontrent, se flairent ; en pareil cas, les hommes se saluent civilement ou militairement ; puis, chiens et hommes finissent par s’accoupler. Les hommes tirent un rideau plus ou moins épais sur le dénouement, voilà toute la différence. Les pourparlers et procédés sociaux des peuples qui se heurtent ressemblent singulièrement aux aboiements et aux frottements des chiens. L’homme prétend que les amours des animaux sont immondes et que les siennes sont d’essence divine. — Je ne vois dans tout cela que circulation de matière et d’électricité vitales : Transformation.

Comment se fait-il qu’alors même que deux peuples ont le plus besoin d’union, à l’heure suprême où l’un s’acharne à la défense et l’autre à la conquête, la division éclate fatalement dans leur sein ? Pourquoi les factions et les sectes achèvent-elles de déchirer les peuples envahis ? Pourquoi les rivalités de pouvoir et les distinctions de races deviennent-elles plus tranchées chaque jour parmi les peuples envahisseurs ? Pourquoi tous ces systèmes absolus, d’une part, toutes ces forces inexorables de l’autre ? Pourquoi, chez le peuple qui meurt, cette société anarchique, hurleuse, de prétoriens, de débauchés, de bellicistes éreintés ? Et chez le peuple qui naît, ce pêle-mêle indescriptible de soudards, de libertins et de philosophes avides de vivre et