Page:Espinas - La Philosophie sociale du XVIIIe siècle et la Révolution.djvu/231

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table et son caractère ombrageux, follement aggressif, se révèlent « il commence par dénoncer le procureur général Manuel comme ayant organisé la famine : il va plus loin et accuse l’administration tout entière, le maire de Paris, les ministres, les Comités ; partout il découvre et dénonce un nouveau pacte de famine. Les sections prennent parti pour l’accusation et nomment une commission pour l’examiner[1]. » C’en était trop. Le 24 brumaire an II (14 nov. 1793), il est enfermé à l’abbaye (4e incarcération) et bientôt la Convention suspend son traitement pour plus de six mois.

Cette fois encore, Babeuf est sauvé par son passé révolutionnaire. Il écrit à Chaumette (29 brumaire) et à Sylvain Maréchal, intéresse de nouveau à son sort Thibaudeau, l’ami dévoué à qui il devait son emploi, fait sonner bien haut les services qu’il prétend avoir rendus pour l’alimentation de Paris, et déjoue « les coupables manœuvres des aristocrates administrateurs de Montdidier. » Sur le rapport de Merlin, la Convention nationale porte l’affaire devant le tribunal de cassation et ce tribunal, par un arrêt du 21 prairial an II, décide que « le directeur du jury du district de Montdidier et le tribunal du département de la Somme ne pouvaient instruire contre Camille Babeuf, pour délits prétendus commis dans l’exercice de ses fonctions administratives, qu’autant que la Convention nationale l’eût renvoyée devant eux. » En conséquence, il casse toute la procédure antérieure et le jugement rendu par le tribunal de Montdidier, et « ordonne que ledit Babeuf soit renvoyé par devant l’accusateur public du tribunal criminel du département de l’Aisne, pour être par lui dressé un nouvel acte, s’il y a lieu, et être son procès jugé selon le mode déterminé par la loi du 30

  1. Janet, Les Origines du Socialisme, p. 155.