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pulation, même destiné à assurer le bonheur commun : il est en général encore ennemi des mesures sanguinaires ; mais il n’est en désaccord avec Robespierre que sur ce point particulier ; le principe politique fondamental que Robespierre a, dit-il, tiré de Jean-Jacques : à savoir que les « régulateurs d’un peuple n’ont rien fait de stable pour sa régénération » s’ils n’ont réalisé l’égalité, Babeuf l’adopte comme l’expression de sa propre pensée ; il y reste fortement attaché. Nous verrons qu’un jour cet accord sur la fin entraînera l’accord sur les moyens.

Babeuf fera donc la guerre à la Convention, à la fois parce qu’elle contient des terroristes (il prétend avoir inventé ce mot) et ne les sacrifie pas tous, et parce qu’elle s’écarte du programme politique et économique de ces terroristes, parce que ses tendances actuelles sont anti-égalitaires (la Constitution de l’an III en sera la preuve), enfin parce qu’elle prétend être un gouvernement. Il fonde le 3 septembre 1794, le journal de la Liberté de la Presse, qu’il imprime rue Honoré, 35, précisément chez ce Guffroy, qui demandait la suppression de 20 millions d’hommes pour assurer le bonheur des cinq millions restants. Le journal réussit. En même temps il colporte dans les clubs, il se fait adresser de son pays des pétitions demandant impérieusement cette même liberté de la presse et l’élection de tous les fonctionnaires. Le 6 septembre 1794, il envoie ses auditeurs du club de l’Evêché pétitionner à la barre de la Convention et, comme les pétitionnaires sont mal reçus, il attaque violemment les conventionnels. Il est bientôt

    ou le Frank en vedette : « Abattons tous les nobles ! Que la guillotine soit en permanence dans toute la France ! La France aura assez de cinq millions d’habitants. » On trouve dans les écrits de cette période d’assez nombreuses manifestations de ce délire de meurtres. Mais, pas plus que Marat, Guffroy, bien que membre du Comité de sûreté générale, ne peut être considéré comme l’organe du gouvernement révolutionnaire.