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théorie le citoyen devait compte à l’État de ses réjouissances comme de ses biens et de ses opinions. « Les amusements que le peuple entier ne partage pas doivent être retranchés d’un État bien constitué[1]. » Faire de la musique chez soi et fêter un’anniversaire de famille deviennent des actes répréhensibles. Les solennités diverses devaient dans leur ensemble former pour les citoyens une sorte de cours encyclopédique des notions et des sentiments qui sont la source de l’esprit public dans une nation régénérée. Elles auraient pour objet l’ordre providentiel de la nature et les merveilles de la vie sociale[2] : les arts utiles, les vertus civiques, les bienfaiteurs de l’humanité, l’histoire de la Révolution. Buonarroti nous donne le nom que devaient porter quelquesunes de ces fêtes ; c’est l’union des sexes, la présentation des nouveaux-nés, l’entrée des enfants dans les maisons d’éducation, le’départ des jeunes gens pour les frontières, leur retour et leur admission au rang des citoyens ; en cas de guerre, le départ des guerriers, leur retour, les honneurs à rendre aux défenseurs’de la Patrie morts dans les combats, et les triomphes à décerner aux plus vaillants.

Dans toutes ces fêtes l’âme des citoyens eût été en quelque sorte élevée au-dessus d’elle-même et transportée dans l’État par des enseignements à la fois patriotiques et religieux, la religion nationale étant le meilleur soutien

    sujets que ces fêtes devaient graver dans l’esprit du peuple et dont la première idée avait été donnée par le décret de la Convention nationale, rendu à la suite du rapport mémorable de Robespierre sur les idées religieuses. » Tome I, p. 258 ; voir aussi sur ce sujet, pages 251, 253 et 254. Il est difficile de ne pas penser, en lisant ces passages, à la religion Saint-Simonienne mais l’idée de progrès que les Saint-Simoniens ont empruntée à Condorcet est étrangère aux Babouvistes, qui s’inspirent de Rousseau.

  1. Tome I, pages 250 et 254.
  2. Tome I, p. 250.