Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/248

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errant un peu au hasard sous les marronniers éclaircis, quand le lion captif m’appela par son rugissement. Cette grande voix me fit ressouvenir de la création animale. Je visitai successivement la ménagerie, l’ancien cabinet de Buffon, et le musée antédiluvien. J’avais la sous mes yeux trois époques, et, pour mieux dire, trois âges de la nature : — les animaux avant l’homme, les animaux dans la vie sauvage, les animaux à l’état de domesticité.

C’est toujours un contraste pénible quand, en sortant de ces belles allées d’arbres où le soleil se perd dans beaucoup de verdure, où chantent des biseaux innombrables, on entre dans les froides galeries du musée géologique, — la mort à côté de la vie.

Le règne animal a eu, comme le globe même que nous habitons, une période fabuleuse. La science, en réunissant les fragmens des mondes ensevelis, brisés, qui ont servi de théâtre aux créations primitives, commence à faire pénétrer quelque lumière dans ces âges de ténèbres : mais le voile qui couvre un ordre de faits si anciens et si mystérieux est loin d’être entièrement soulevé. La propriété qu’avait alors la substance même des couches de conserver les formes, — propriété qu’on pourrait nommer la mémoire du globe terrestre, et qui s’affaiblit comme celle de l’homme en vieillissant, — nous a seule sauvé de l’oubli quelques traces de ces premiers temps. Autant qu’on peut en juger sur de si frêles témoignages, l’enfance du règne animal a été une ère pénible et désastreuse. L’existence des individus, enveloppée dans la vie générale du globe, était sans cesse remise