Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/83

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Et, prenant Minna sous les bras, il l’enleva du panneau et la posa doucement sur l’herbe courte d’une petite place où paissaient des oisons.

— Vous êtes fort, Daniel ! dit la jeune fille, un peu troublée pour avoir été, quelques secondes, entre ses mains et avoir senti son haleine lui caresser le visage.

— D’une force ordinaire… mais c’est que vous n’êtes pas très lourde ! fit-il en souriant.

La cloche au son grêle annonçait la messe. Minna, suivie de Daniel et de son père, se dirigea vers l’église en traversant le petit cimetière, tout remué par des sépultures récentes, qui l’entourait. Lorsqu’ils furent sous le modeste porche roman, bâti en pierres de grison, c’est-à-dire de grès, rongées, effritées par le temps, ils se firent leurs adieux.

— Après-demain je vous enverrai du quinquina par Gary qui revient à Légé, dit Minna, comme Daniel lui serrait la main.

— Merci d’avance pour les fiévreux, ma cousine !

Après un dernier regard à la jeune fille qui entrait dans l’église, Daniel alla vers sa jument : plantée dans un pan de bois d’une masure en pisé, une cheville coudée en retenait la bride. Sur un banc, près de la porte, une fillette de cinq ou six ans était couchée à plat ventre, au soleil, grelottant la fièvre. Voyant approcher le docteur, un homme vint sur le seuil et salua d’un signe de tête.

— C’est votre petite ? fit Daniel.

— Eh ! oui.

— Elle a les fièvres, à ce qu’il me paraît ?

— Nous les avons tous… Ma femme est au lit… Moi, ça n’est pas mon jour.

L’homme avait la figure terreuse, les os de la face