Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais, de tous les visiteurs, M. Caumont fut le plus glacialement reçu. Le pauvre homme, dans sa sottise suffisante et bonasse, s’était naïvement figuré que sa qualité de « compatriote » lui vaudrait un accueil particulièrement cordial : aussi fut-il fort surpris de la grise mine de madame Chaboin, et très étonné de voir ses souvenirs précis et ses appels à la mémoire de sa « payse » rester infructueux. À l’encontre de ces parvenus qui, par un autre genre de vanité, montrent sous globe les sabots qui les ont portés à la fortune, cette orgueilleuse avait tout oublié, son village natal et l’humble maison paternelle… Oui, et elle reniait sa vieille mère en coiffe du pays avec un foulard noué par-dessus : « Monsieur Caumont devait se tromper… il y avait tant de familles portant le même nom qu’elle par là, que la confusion était facile… En ce qui la concernait, elle avait quitté le pays avant l’époque dont parlait monsieur le juge… »

Malgré son peu d’intelligence, M. Caumont finit par comprendre que la petite fille dépenaillée de jadis ne voulait pas se rappeler le passé, et il se tut.

— « Maria » fait la fière, dit-il en confidence à ses filles, lorsqu’il fut revenu. Elle ne se souvient plus d’avoir gardé les oisons que sa mère élevait pour vendre les foies…

Mais, en public, il se jactait d’avoir été particulièrement bien accueilli. Au reste, tous les visiteurs